Hors-dossierNote de lecture

Franco-Amérique. Nouvelle édition revue et augmentée, sous la direction de Dean Louder et Éric Waddell, Québec, Septentrion, 2017, 400 p.[Record]

  • Simon Couillard

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  • Simon Couillard
    Centre interuniversitaire d’études québécoises, UQTR

Le 9 mai dernier, Dean Louder décédait. Québécois d’adoption, Américain d’origine, mormon, ce géographe et professeur à l’Université Laval, aventurier et voyageur, entretenait un cercle de Franco-Américains (au sens large et non restreint aux « Franco-Étatsuniens » du Nord-Est) rencontrés aux quatre coins du continent. Il recevait ses nombreux amis à Québec, se déplaçait régulièrement pour participer aux manifestations et aux événements liés à cette Franco-Amérique qu’il aimait et à laquelle il s’est dévoué. Dans la dernière édition du Forum (été 2017 – revue franco-américaine), son ami, l’artiste Grégoire Chabot, résumait cette socialité complexe et ce dévouement par une analogie culinaire bien choisie : « Chez Dean : An amazing gourmet kitchen, PLUS meals on wheels » ! On le regrettera donc… et dans des lieux insoupçonnés. La réédition de Franco-Amérique chez Septentrion, codirigé avec Éric Waddell, témoigne de ces nombreux déplacements. On trouve ainsi plusieurs encadrés, toujours en lien avec le propos du chapitre dans lequel ils apparaissent, où le professeur Louder décrit une rencontre ou une expérience personnelle qui donne substance à cette « communauté imaginée » des Franco-Américains. L’ouvrage lui-même compte une nouvelle contribution par rapport à l’édition de 2008, celle de Serge Dupuis sur « La Floride canadienne-française d’hier à aujourd’hui », bien fouillée et fort intéressante. Il compte également des « épilogues » qui font le point, dix ans plus tard et par des auteurs différents (David Vermette, Clint Bruce, James LaForest, Carlos Aparicio), sur les conclusions et les analyses contenues dans les contributions originales de Barry Rodrigue (« Francophones, pas toujours, mais toujours Franco-Américains »), Richard Guidry (« Mémoire d’un Cadien passionné »), Jean Lamarre (« Migrants, défricheurs, fondateurs : les Canadiens français du Michigan et de l’Illinois ») et Jean Morisset (« La grande tribu des gens libres… »). Autre nouveauté, le format de la nouvelle édition est sensiblement plus petit, ce qui convient bien. Cela dit, comme pour l’édition originale, c’est le problème posé par ce livre (qui est aussi celui de la Franco-Amérique) qui retient spontanément l’attention. On pourrait le traduire de la façon suivante : comment est-il possible d’intéresser un Québécois francophone par ailleurs cultivé – le lectorat visé –, à la diaspora québécoise, et plus largement à l’Amérique francophone ? Joseph-Yvon Thériault, dans la contribution qui clôt l’ouvrage, précise le cadre dans lequel se posent cette question et ce problème : S’il faut ajouter à cette ambivalence l’accusation de « tribalisme » qui pèse d’emblée sur les Québécois dans leur pays, il est facile de saisir la nervosité qui entoure le sujet. Et si vous évoluez parmi les intellectuels québécois tout en vous intéressant à la question de la diaspora québécoise (c’est bien mon cas), si vous évoquez le sujet, vous connaissez cette ambivalence, pour ne pas dire cette réticence, qu’il faut toujours désamorcer et qui porte les stigmates d’une longue lutte politique. Il faut dire que cette restriction idéologique des intellectuels québécois a porté des fruits : les jeunes (18-24 ans) au Québec ne se sont jamais autant dit « Québécois », et jamais si peu dit « Canadiens français ». Cependant, si on considère que le résultat anticipé de cette identification des Québécois à leur État devait être l’indépendance politique à l’égard de la fédération canadienne, la restriction idéologique a été un échec dans la mesure où l’appui des jeunes Québécois à l’indépendance n’a jamais été aussi bas en cinquante ans ! Dans ce contexte, ne serait-il pas temps d’inviter ces intellectuels à considérer la Franco-Amérique à nouveau comme une « matière patrimoniale » (Virgil Benoit, p. 277), comme une source pour renouveler notre imaginaire, nos …

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