Abstracts
Résumé
Dans les études sur la corruption politique, on trouve fréquemment des retours au lieu commun que les problèmes d’abus de charge publique en vue d’un intérêt privé ne peuvent être réglés sans la magie du leadership (l’anglicisme malheureux s’impose ici), cette qualité énigmatique de commandement qui saurait mettre en place les dispositifs d’incitatifs, de surveillance et de contrôle nécessaires pour contrer les abus. Mais un tel argument mène à une aporie, car les études qui placent ainsi leur confiance dans cet énigmatique leadership sont également traversées par l’idée, aussi un lieu commun, que toute autorité qui n’est pas sujette à la surveillance et au contrôle aura tendance à être corrompue. Dans cet essai, je propose de lire Le Prince de Machiavel comme une méditation sur le paradoxe suivant : l’autorité du principe est à la fois la source de la purification politique et la cause principale de la corruption. Le Prince, souvent considéré comme un texte fondateur des « leadership ethics », sera mal compris s’il n’est pas lu à la lumière de la préoccupation centrale de Machiavel républicain : la corruption.
Abstract
In studies on political corruption one sees frequent appeals to the cliché that the abuse of public office for private gain cannot be fought without the magic of ‘leadership’, that enigmatic quality that enables rulers to put in place the incentive structures and the institutions of surveillance and control that ensure integrity. But this argument leads to a catch-22, for these very studies that place their confidence in the power of leaders are equally committed to the view (also a commonplace) that all authority that is not subject to surveillance and control is liable to corruption. In this paper, I propose to read Machiavelli’s Prince as a meditation on the following paradox: the authority of the prince is both the source of political purification and the principal cause of corruption. The Prince, often considered a foundational text for ‘leadership ethics,’ will be misunderstood if its counsels are not read in light of the central preoccupation of the republican Machiavelli: corruption.