Comptes rendus

Jean Bernabé, Jean-Luc Bonniol, Raphaël Confiant, Gerry L’Étang (dir.), Au visiteur lumineux. Des îles créoles aux sociétés plurielles.Mélanges offerts à Jean Benoist. Petit-Bourg (Guadeloupe), Ibis Rouge, 2000, 716 p., bibliogr., index.[Record]

  • Nicolas Vonarx

…more information

  • Nicolas Vonarx
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    Québec (Québec) G1K 7P4
    Canada

C’est pour saluer Jean Benoist et son oeuvre que 48 auteurs nous livrent dans cet ouvrage volumineux des réflexions qui concernent pour la plupart les sociétés créoles des Antilles et de l’Océan indien. En suivant Bernabé, Bonniol, Confiant et l’Étang à qui nous devons l’initiative de l’hommage adressé ici, il faut reconnaître que Jean Benoist a grandement contribué au projet de connaissance des sociétés créoles et à la production d’outils théoriques capables d’en saisir les profondeurs et d’en apprécier l’originalité et le dynamisme. Ainsi, après le passage et les interrogations dudit « Visiteur Lumineux » dans des anciennes colonies françaises, on a frayé des sentiers, balisé des pistes et commencé à éclairer des directions de recherche. Ceux qui partagent une préoccupation commune pour les terrains et les populations créoles les suivent, et n’ont d’autre choix que de considérer encore et toujours les travaux de Jean Benoist, de s’en inspirer et de s’y référer pour parcourir ces voies de connaissance. Cet ouvrage réunit donc de nombreux chercheurs sur le thème très large des îles créoles et des sociétés plurielles dont les plus représentées ici sont la Martinique et la Réunion. Il est resté à ce sujet sur les traces de Jean Benoist en favorisant des terrains sur lesquels il a longtemps travaillé. Mais que le lecteur intéressé par les mondes créoles se rassure, il lira dans cet éventail de sujets des écrits qui concernent les Antilles dans leur globalité, l’île Maurice, la Guyane française, la Guadeloupe et Haïti dans une moindre mesure. Mais rien sur les îles hispanophones et anglophones de la Caraïbe. Les 48 textes de l’ouvrage sont répartis sous 15 thématiques. Celles-ci sont le plus souvent appropriées si on considère le sujet des textes qui y sont rattachés, bien qu’il soit difficile de satisfaire complètement à cette exigence compte tenu de la variété et de la richesse des écrits. L’ouvrage est donc lui aussi pluriel et les chercheurs en sciences sociales y trouveront des lieux de questionnements familiers. Le foncier et l’économie, le religieux, les ethnomédecines, le biologique et la santé, la langue, l’« oraliture » et la littérature annoncent chacun trois ou quatre textes, alors que l’identité, l’ethnicité et le multiculturalisme en regroupent huit et la famille un seul. Mais d’abord et à l’honneur, le parcours de Jean Benoist, souligné par Bonniol qui ne tarit pas d’éloges pour celui qui l’a dirigé, et à qui l’on doit d’avoir initié une ethnologie des sociétés créoles. De là, Sainton nous précise comment Jean Benoist a su ouvrir des perspectives identitaires aux Antillais en rapportant le concept de « civilisation antillaise » et en stimulant la production locale de recherches scientifiques. Et L’Étang nous invite ensuite à découvrir, dans une analyse de récits, comment s’est construite la représentation du marron. Dangereux cannibale dans certaines îles, cette figure a pénétré progressivement les imaginaires sans qu’on puisse y voir le marron comme un héros de la liberté. Nous voilà alors au sein d’une thématique où l’on se laisse porter par le discours poignant de Curtius qui use des concepts de « désontologisme » et de « réonto-logisme » en soulignant la douloureuse réalité dans la plantation, la chosification de l’esclave et ce nouvel être-au-monde qu’il fallait redéfinir une fois la liberté acquise. Passons sur certains textes, puisque l’exhaustivité nous est impossible dans ces quelques commentaires, pour arriver dans la singulière Guyane française dont le peuplement n’a pas conduit à une économie de plantation comme dans d’autres sociétés esclavagistes. Et Cherubini de préciser que cette société s’est inventée un profil créole original, influencé par la coexistence de petites habitations. Restons dans la thématique « …