Exposition virtuelle conçue par Francine Saillant, Frantz Voltaire et Sarah Bourdages-Duclot dans le cadre de la Semaine d’action contre le racisme (SACR) (Montréal, 17-24 mars 2021). En collaboration avec le Centre International de Documentation et d’Information Haïtienne, Caribéenne et Afro-canadienne (CIDIHCA), le Laboratoire de recherche sur les relations interculturelles de l’Université de Montréal (LABRRI) et le Groupe de recherche sur les imaginaires politiques en Amérique latine (GRIPAL). Le 17 mars 2021, l’exposition Les villes d’à côté était inaugurée en ligne. À travers des extraits de témoignages, 70 dessins et 110 photographies et vidéos produits en grande majorité par des jeunes résidant dans des quartiers marginalisés de Montréal, Port-au-Prince, Rio de Janeiro et de la région parisienne, cette exposition virtuelle invite à placer le curseur de nos regards loin des représentations médiatiques qui ne restituent bien souvent de la vie de ces jeunes que des ombres déformées. Cette exposition s’apparente dès lors à un exercice de mise en lumière et de redressement de perspectives, nous permettant, pour reprendre les termes d’un des participants, d’aller à rebours des esprits qui « pensent de travers ». La proposition initiale est ambitieuse : rapprocher à travers des témoignages, des dessins, des photographies et des vidéos l’expérience de vie de plusieurs jeunes personnes (18-30 ans) issues des zones marginalisées de quatre métropoles. Au Canada, le projet se déroule au Nord de Montréal, dans le quartier Saint-Michel et dans l’arrondissement Montréal-Nord, deux quartiers parmi les plus pauvres du pays, tous deux situés dans un environnement fortement marqué par une histoire ouvrière et par une population issue de l’immigration. En France, le projet se déroule dans la commune de Grigny, en plein coeur d’un ancien quartier ouvrier située dans la banlieue sud de Paris, également marquée par une histoire d’immigration qui s’est considérablement accélérée dès la seconde moitié des années 1960. En addition à ces deux contextes, le projet élargit ses frontières en se déployant dans la capitale d’Haïti, au coeur de plusieurs quartiers populaires de la capitale de Port-au-Prince et enfin dans les ruelles de Rocinha, la plus grande favela brésilienne, située au sud de Rio de Janeiro. Alors que certains quartiers populaires de Port-au-Prince sont devenus le théâtre d’affrontements quotidiens entre bandes rivales et font l’objet de violentes opérations policières et militaires (Djems 2019), la favela de Rocinha, est traversée par une guerre entre narcotrafiquants qui sévit simultanément à l’accroissement de la corruption et des violences policières (Soares Gonçalves 2006). Malgré plusieurs écarts manifestes séparant chacun de ces quartiers situés aux 4 coins du globe, (le terme « quartier » est lui-même difficilement adoptable pour chacun des lieux), de nombreux aspects contextuels créent néanmoins de riches espaces de résonnance qui ont probablement stimulé l’intuition des commissaires à l’origine de ce projet. Initialement pensée afin d’être présentée « physiquement », cette exposition devait à l’origine permettre de relier entre eux les dessins produits par les participants, quelles que soient leur provenance, grâce à une petite césure découpée au centre des feuilles de papier. Ce dispositif de reliure aurait ainsi permis de matérialiser la mise en relation de ces quatre contextes. En raison de la pandémie, cette exposition « physique » n’a finalement pas pu avoir lieu. La mise en relation de l’ensemble de ces matériaux s’opère donc de manière virtuelle, au fil des « galeries » accessibles sur la plateforme virtuelle de l’exposition. Dans la continuité d’initiatives ethnographiques visant à expérimenter de nouvelles formes de méthodologies collaboratives et créatives (Culhane 2017), cette exposition virtuelle nous propose une navigation à travers les espaces de vie quotidiens, intimes et imaginaires de l’ensemble des participants du projet. En poussant …
Appendices
Bibliographie
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