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Les écoles primaires et secondaires québécoises ont officiellement inscrit l’art dramatique dans le parcours scolaire des élèves au début des années 1970. Le programme, d’abord nommé « Expression dramatique », a été révisé dans les années 1980 et rebaptisé « Art dramatique », passant d’une approche expressive à une approche créative. La réforme des années 2000 a ensuite instauré une approche par compétences qui insiste sur le processus de création et arrime ces compétences sur celles, « transversales », de l’ensemble du programme de formation de l’élève. L’art dramatique répond, par exemple, aux objectifs de favoriser la socialisation des élèves et d’exercer un jugement critique.

Trois moutures différentes du programme d’art dramatique ont été proposées depuis son instauration, il y a 45 ans, lesquelles traduisent l’évolution des pratiques et de la vision de l’enseignement de l’art dramatique au Québec. On sait par ailleurs que les frontières de l’art théâtral sont mouvantes, autant parce qu’il interagit avec les autres arts qu’en raison de la multiplication des lieux dans lesquels on le pratique et des visées que lui attribuent, par exemple, des organismes de santé ou communautaires qui l’investissent. Dès lors, les questions liées à la formation s’avèrent cruciales : dans ce contexte de mutations, comment former les formateurs? Quel art dramatique enseigneront ces formateurs? Quelles visées, quels objectifs aura cet enseignement? L’Annuaire théâtral s’est intéressé à ce sujet en 1994 dans un dossier dirigé par Francine Chaîné (« L’enfance de l’art », no 16). Vingt ans plus tard, un nouvel examen de l’état des lieux s’impose.

Coordonné par Francine Chaîné et Carole Marceau, le présent dossier contient des études sur la formation des futurs enseignants en art dramatique, ainsi que sur la formation des acteurs, des enfants et des adolescents. Il aborde également l’art dramatique comme une forme de thérapie. En contrepoids au langage parfois très abstrait des devis ministériels – voire abscons pour quiconque n’est pas familier avec la terminologie de la pédagogie –, les articles proposent une constellation d’outils pratiques et de stratégies, approfondis par leurs auteurs dans leur propre expérience d’enseignement ou de stage, qui favorisent le contact avec les élèves et la transmission des connaissances. En outre, la présence de collaborateurs étrangers, de France et du Brésil, permet d’établir des points de comparaison avec les pratiques québécoises. Les deux textes qui complètent le dossier dans la rubrique « Documents », un témoignage et un entretien, donnent l’occasion aux deux formateurs aguerris que sont John O’Toole et Jacques Lessard de présenter les techniques qu’ils ont affinées tout au long de leur parcours d’enseignant. Le dossier plonge ainsi au coeur de la pratique et soulève les questions fondamentales des visées et vertus de l’enseignement de l’art dramatique dans la formation des élèves.

Aussi dans ce numéro

De retour dans ce numéro, la « Revue des revues » est préparée par Sara Thibault, étudiante au doctorat à l’Université du Québec à Trois-Rivières, qui en est à sa première collaboration.Elle recense une sélection de numéros parus depuis 2013 dans différentes revues en s’attardant notamment à la refonte de la revue Jeu, qui a complètement transformé son format – et partiellement son contenu – cette année. Les deux articles de la rubrique « Pratiques et travaux » portent quant à eux sur des textes du répertoire québécois ayant fait l’objet d’une attention récente. Le cinquième volume des Oeuvres complètes d’Anne Hébert, paru en avril 2015, contient les oeuvres théâtrales de l’auteure, parmi lesquelles pas moins de sept versions du Temps sauvage. Annie Tanguay, qui a participé à l’édition critique des textes de ce volume, présente dans son article la genèse du Temps sauvage en abordant la transformation des personnages féminins, le traitement du paysage et la question religieuse. Michèle Laliberté propose quant à elle une étude des modifications linguistiques que René Richard Cyr a effectuées dans le texte des Belles-Soeurs lors de la présentation en France de l’adaptation musicale de la pièce de Tremblay. Elle analyse la réception critique parisienne du spectacle en 2012 en la comparant à celle de la pièce en 1973 et pose la question de l’utilisation des surtitres sur scène et de leur impact sur le spectateur.

Bonne lecture!