Abstracts
Résumé
Cet article, issu d’une recherche doctorale en cours en anthropologie, explore les parcours migratoires des réfugiés syriens-arméniens qui se sont installés au Liban (pays de « transit ») et au Québec (pays de « réinstallation ») en raison du conflit en Syrie. L’étude vise à identifier les défis rencontrés par les réfugiés syriens-arméniens durant leurs parcours migratoires, ainsi que les sources de soutien qui ont facilité leur adaptation dans les différents pays d’installation. Les résultats révèlent que les réseaux diasporiques arméniens constituent les principales sources de soutien matériel, économique, social, informationnel et émotionnel pour les réfugiés syriens-arméniens. Ces réseaux jouent un rôle essentiel en offrant aux réfugiés des opportunités d’emploi, de logement, d’éducation, d’accompagnement et de réinstallation définitive.
Afin d’appréhender les parcours migratoires des réfugiés dans leur globalité, une approche qualitative et transnationale a été privilégiée. Une recherche ethnographique multisite a été menée au Liban et au Québec, comprenant des observations ethnographiques, des entretiens de type récit de vie avec 21 réfugiés syriens-arméniens et des entretiens semi-dirigés avec 15 intervenants et représentants d’organisations et d’institutions arméniennes impliqués dans l’accompagnement des réfugiés.
Mots-clés :
- réfugiés,
- diaspora,
- réseaux,
- parcours migratoires,
- Arméniens,
- Syrie
Article body
Introduction
Le conflit syrien a déclenché l’une des pires crises humanitaires actuelles, forçant le déplacement d’environ 13 millions de personnes. Plus de 6,6 millions d’entre elles se sont réfugiées à l’étranger (Organisation des Nations Unies [ONU], 2021). Le Liban, à lui seul, héberge jusqu’à aujourd’hui près de 1,1 million de réfugiés syriens (Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés [UNHCR], 2023), le plaçant en tête des pays accueillant le plus de réfugiés par habitant au monde. L'afflux massif des réfugiés syriens au Liban a engendré d'importants bouleversements démographiques et socio-économiques (Balanche et Verdeil, 2016). La détérioration de la situation du pays n'a fait qu'aggraver les conditions de vie des réfugiés (Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, 2024).
Face à la « crise migratoire » en mer Méditerrané (2015), le Canada a mis en place une opération de réinstallation de réfugiés syriens. De 2015 à 2019, cette initiative a permis l’arrivée d’environ 64 000 réfugiés syriens dans le pays, dont plus de 14 000 au Québec (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC], 2019a). Contrairement aux autres provinces canadiennes, où les réfugiés syriens ont été majoritairement pris en charge par l'État, au Québec, plus de 80 % d’entre eux ont été admis par l’entremise du programme de parrainage par des collectivités (IRCC, 2019b). Ce programme de parrainage privé permet à des groupes de deux à cinq personnes et des personnes morales de parrainer, devenir garantes et soutenir des réfugiés pendant la première année d’installation.
Durant les premières années de cette opération au Québec, le programme de parrainage privé a été souvent utilisé par diverses minorités chrétiennes-syriennes déjà établies dans la province pour soutenir les membres de leurs communautés (Hanley et al. 2018). Parmi ces minorités se trouvent les Syriens-Arméniens (Djerrahian, 2017; Shoemaker, 2017), une sous-catégorie spécifique de la population syrienne issue des survivants du génocide arménien et faisant partie de la vaste diaspora arménienne (Thomas Felten, Yagaloff et Yarmaloyan, 2020).
Comment ces réfugiés ont-ils vécu leurs parcours migratoires et quels défis et sources de soutien ont-ils rencontrés? En tant que membres d’une diaspora plus large et dispersée sur plusieurs territoires, comment leurs réseaux diasporiques ont-ils façonné leurs trajectoires migratoires et influencé leurs stratégies d’adaptation ?
Examinant les expériences pré-, péri- et post-migratoires (Papazian-Zohrabian, Mamprin, Lemire et Turpin-Samson, 2018) des réfugiés syriens-arméniens, cette recherche explore leurs parcours migratoires depuis la Syrie en passant par le Liban (pays de transit) et jusqu'au Québec (pays de réinstallation). Les trajectoires au Liban sont étudiées car de nombreux réfugiés syriens réinstallés au Canada, dont les Syriens-Arméniens, ont préalablement traversé ce pays (IRCC, 2020). À travers une étude ethnographique multisite menée au Liban et au Québec, 21 réfugiés syriens-arméniens ont été rencontrés, ainsi qu'une quinzaine d'intervenants et représentants d’organisations et d’institutions arméniennes soutenant les réfugiés. Adoptant une approche transnationale, soit une perspective examinant les interactions au-delà des frontières (Glick-Schiller, Basch et Szanton, 1995), les défis rencontrés par les réfugiés syriens-arméniens tout au long de leurs parcours migratoires ont été identifiés, ainsi que les différents types de soutien fournis par leurs réseaux arméniens.
Cette étude démontre que les réseaux diasporiques informels (famille proche ou éloignée, amis, voisins, etc.) et formels (organisations, associations et institutions) sont des sources de soutien cruciales pour les réfugiés syriens-arméniens. Ces réseaux non seulement influencent les trajectoires migratoires des réfugiés (destinations et routes), mais facilitent également leur intégration économique, leur adaptation et leur mobilité. L’étude met en lumière l’esprit d’entraide qui prime au sein des diasporas, élément de consolidation malgré leur dispersion.
Revue de la littérature
Cette section propose une revue de la littérature autour de trois thématiques : l'histoire des Syriens-Arméniens et leurs expériences d’exil, l’analyse des réseaux des réfugiés et la particularité des réseaux diasporiques.
Les Syriens-Arméniens : un double déplacement
Environ 1,5 million de personnes ont péri lors du génocide arménien, perpétré par les forces turques-ottomanes et kémalistes entre 1915 et 1923. Des milliers de rescapés se sont établis en Syrie, formant des communautés durables à Alep et le long de la région du Djézireh, ainsi qu’à Deir ez-Zor, Damas et Lattaquié (Payaslian, 2007).
Malgré le génocide et le déplacement forcé, les Arméniens se sont rapidement incorporés à la vie sociale et économique syrienne, soutenus en grande partie par les autorités françaises durant leur mandat en Syrie (1918-1946) (Lust-Okar, 1996). La communauté arménienne de Syrie s'est consolidée durant les années 1970, dans un environnement complexe marqué par la dictature de Hafez Al-Assad. Issu lui-même de la minorité alaouite, il a favorisé le développement de structures éducatives et religieuses de certaines minorités, dont les Arméniens (Migliorino, 2006). Sous le régime de Bashar Al-Assad, une certaine ouverture économique a permis aux commerçants syriens-arméniens de saisir des opportunités pour consolider leur rôle économique et social dans le pays (Della-Gatta, 2019). Cette période a favorisé l'émergence d'une communauté prospère et dynamique, comptant plus de 100 000 personnes, principalement issues de classes moyennes et aisées (Petrosyan, 2019).
Sur le plan politique, les Syriens-Arméniens ont dû prouver leur allégeance au régime (Payaslian, 2007). Cette situation les a exposés à des risques supplémentaires pendant la guerre, certains groupes d'opposition les considérant comme des alliés du gouvernement (Mollica, 2018). Avec l’éclatement du conflit, l'arrivée des mouvements islamistes et la balkanisation du pays (Hakobyan, 2016), les Syriens-Arméniens ainsi que d'autres minorités sont devenus les cibles de certains groupes intégristes (Mollica et Hakobyan, 2021). Les violences contre les Syriens-Arméniens ont atteint leur sommet en 2014, lors de la crise de Kessab. Ce village, l'une des plus anciennes localités arméniennes du Proche-Orient, a été envahi par le groupe Jabhat Al-Nusra (affilié à Al-Qaeda), entraînant sa destruction, des enlèvements, des assassinats et la profanation des églises (Bandak, 2018; Cheterian, 2014).
Face à la violence extrême, la majorité des Syriens-Arméniens ont fui le pays (Baghdassarian et Broidy, 2018). Environ 30 000 personnes se sont réfugiées en Arménie (Della Gatta 2019; Thomas et al., 2020), tandis que des milliers d’autres sont allées au Liban. Nombreux se sont rendus au Liban en raison de leurs réseaux familiaux, amicaux et diasporiques préexistants, qui les liaient avec des Libanais-Arméniens (Madoré, 2016; Mollica, 2018).
Le Liban, toutefois, a présenté un environnement difficile pour les réfugiés provenant de Syrie, marqué par des défis sociaux et économiques significatifs (Fawaz, Gharbieh, Harb et Salamé, 2017). Étant donné que le Liban n'a jamais ratifié la Convention de Genève de 1951 et n’octroie pas de statut de protection, les Syriens doivent recourir au système de la kafala, un mécanisme de parrainage qui lie leur résidence légale à un garant libanais (kafil) à travers une relation de travail (Janmyr, 2016). À cause de cette situation, on estime qu’environ 75 % des réfugiés syriens au Liban vivent désormais dans la clandestinité (Ruch, 2021). La crise économique prolongée au Liban a aggravé les conditions des Syriens, plus de 90 % d'entre eux vivant sous le seuil de pauvreté (Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, UNICEF et UNWFP, 2020).
Grâce au soutien de la communauté libano-arménienne, la situation des Syriens-Arméniens au Liban s’est avérée légèrement moins précaire que celle des autres réfugiés de Syrie (Madoré, 2016; Zolyan, 2015). Principalement installés à Bourj Hammoud, l’enclave arménienne de Beyrouth, les Syriens-Arméniens ont bénéficié du soutien de la communauté arménienne pour accéder au logement, à la kafala, à l'emploi et à des services essentiels (Mollica, 2018; Tashjian, 2020).
Face aux difficultés de (sur)vie au Liban et à l’impossibilité de retourner en Syrie, de nombreux réfugiés syriens-arméniens ont saisi des opportunités de réinstallation ailleurs, notamment au Canada (Djerrahian, 2017) et en Australie (Collins, Reid, Groutsis, Watson et Ozkul, 2018; Thomas, Baghdassarian et Schug, 2021). Au Québec, la communauté arménienne, ses organisations et ses institutions ont collaboré pendant plusieurs années afin de parrainer, accueillir et soutenir quelque 3 000 réfugiés syriens-arméniens (Kerimian, 2019). Une dynamique similaire, mais moins importante, a eu lieu à Toronto, où des églises arméniennes ont parrainé des familles syriennes-arméniennes (Oda et al., 2017).
À ce jour, aucune recherche ne porte sur les réseaux des réfugiés syriens-arméniens au Québec. Cependant, des études sur les réfugiés syriens parrainés par le privé mettent en lumière les différents défis rencontrés par ces personnes (barrières linguistiques, déqualification, séparation familiale), ainsi que l'importance primordiale de leurs réseaux familiaux, ethniques, religieux et communautaires dans le processus d’adaptation (Blain et al., 2022; Hanley et al., 2018).
Les réseaux des réfugiés
Certains milieux sociaux tendent à associer le concept de réfugié à celui de « sanctuaire », en supposant à tort que ces personnes ont perdu leurs systèmes de soutien et dépendent continuellement de l'aide humanitaire (Lamba et Krahn, 2003). Notre étude adopte plutôt l’optique de l’anthropologue Alessandro Monsutti (2005), selon laquelle les réfugiés peuvent mobiliser leurs propres ressources socioculturelles pour surmonter les obstacles rencontrés. Afin de mieux comprendre les systèmes de soutien et la capacité d’action des réfugiés, cette étude se concentre sur leurs réseaux, c’est-à-dire les relations interpersonnelles mobilisables dans des situations spécifiques (Portes, 2000). Cette approche permet de concevoir les réfugiés comme des agents proactifs et de révéler les stratégies qu'ils déploient en fonction de leurs liens sociaux.
Plusieurs études sur les réseaux des réfugiés utilisent la typologie de Putnam (2000) qui distingue les liens de cohésion (bonding), les liens de connexion (bridging) et les liens de liaison (linking) (Nannestad, Svendsen et Svendsen, 2008; Suter et Magnusson, 2015). Les liens de cohésion unissent des individus similaires sociologiquement (groupe familial, amical, ethnique), tandis que les liens de connexion englobent des liens entre individus appartenant à des groupes différents (autres origines ethniques, classes sociales, etc.). Les liens sociaux de liaison, pour leur part, se forment à travers l'engagement dans des associations, institutions et organisations (Béji et Pellerin, 2010).
Les liens de cohésion fournissent du soutien social, informationnel, matériel et émotionnel aux réfugiés (Hynie, Crooks et Barragan, 2011). Ils peuvent influencer le moment de la migration, ainsi que les routes et les destinations visées (Hanley et al., 2018). Ces liens peuvent également faciliter l’insertion en emploi (Kayayan, 2020) et influencer les choix de lieu d’installation des réfugiés, qui préfèrent souvent s’installer dans des zones où leur communauté est concentrée. Ces zones peuvent faciliter l'accès à des opportunités d’emploi et à des informations (Holmes et Marcelli, 2019) et peuvent protéger face à la possible hostilité du contexte d'accueil (Lincoln et al., 2021).
Malgré leur importance, une dépendance excessive aux liens de cohésion peut conduire à l'isolement et à la marginalisation (Portes, 2003). Lorsque les réseaux des réfugiés se limitent à des liens avec d’autres nouveaux arrivants dans des situations similaires, le soutien et les informations peuvent s'avérer moins efficaces, les réfugiés risquant d’être piégés dans des conditions de sous-emploi et d’exploitation (Béji et Pellerin, 2010; Garrido et Olmos, 2006).
Les liens de connexion sont généralement moins développés chez les réfugiés (Hanley et al., 2018; Lamba et Krahn, 2003). En revanche, ils offrent un soutien social et informationnel significatif et peuvent faciliter de meilleures opportunités d'emploi (Chicha, 2009). Les interactions développées dans divers espaces de sociabilité interculturelle, tels que le travail ou l’école, favorisent l’étendue des liens de connexion et peuvent élargir les réseaux de soutien en général (Glick-Schiller et Çaglar, 2016).
Les liens de liaison, formés à travers la participation à des associations, organisations et institutions, offrent également un soutien déterminant aux réfugiés (Wang et Handy, 2014). La participation dans ces espaces joue un rôle vital dans la réduction de l'isolement et dans le renforcement de la résilience en offrant des plateformes durables de connexion (Ninh, 2016).
La plupart des recherches canadiennes étudiant les réseaux des réfugiés syriens et leurs stratégies d’adaptation (Cherubini, 2024; Hanley et al., 2018; Mahajan, Meyer et Neiterman, 2022) se sont concentrées sur la phase de réinstallation au Canada. Toutefois, il est important d’explorer également le rôle de leurs réseaux lors des phases pré- et péri-migratoires pour une compréhension globale des systèmes de soutien (Suter et Magnusson, 2015). Ces phases sont souvent marquées par la précarité et le manque de soutien étatique, soulignant ainsi l'importance des réseaux pour les réfugiés (Mountz, 2011; Vukčević, Bobić et Živanović, 2023).
En outre, il est important de considérer que la capacité d'action des réseaux des réfugiés est influencée par des structures plus larges (Faist, 2009), telles que les politiques migratoires, le contexte socio-économique du moment, etc. Le géographe Theodoros Iosifides (2011) remarque que la majorité des études portant sur l’adaptation des migrants et des réfugiés tendent à surestimer la capacité de leurs réseaux, tandis que les facteurs structurels, pourtant tout aussi cruciaux, sont parfois négligés.
Les réseaux diasporiques
Puisque les Syriens-Arméniens font partie d’une diaspora plus large (la diaspora arménienne), ils bénéficient d'un type spécifique de réseaux : les réseaux diasporiques. Ils sont constitués des liens entre les membres d'une communauté dispersée sur différents territoires, incluant individus, familles, amis, organisations et institutions partageant une identité ethnique commune (Prévélakis, 1994). Les diasporas, souvent dispersées en raison d'événements tragiques, utilisent ces réseaux pour rester connectées au-delà des frontières nationales (Cohen, 1996).
Les réseaux diasporiques fonctionnent avec une logique locale et transnationale : ils englobent les liens que les individus maintiennent au sein de leur groupe dans le pays d’accueil ainsi que les liens qu’ils conservent avec les membres de leur communauté installés dans le territoire d’origine et d’autres pays (Tölölyan, 2019). Ils incluent donc tous les liens que les individus peuvent entretenir avec des personnes et des entités appartenant à leur groupe ethnique. Ces réseaux opèrent dans un espace social transnational (Glick-Schiller et Fouron, 1999), un espace non délimité aux frontières des États-nations.
Les diasporas partagent un fort sentiment de parenté entre communautés dispersées, ce qui se traduit par une fréquence élevée de contacts et un grand degré d’entraide. Les réseaux diasporiques peuvent donc fournir un soutien précieux aux réfugiés issus de diasporas. Par exemple, une étude menée par le sociologue Östen Wahlbeck (2002) auprès de réfugiés kurdes en Europe a démontré que les réseaux diasporiques guident les trajectoires migratoires des réfugiés, interconnectent les différentes communautés kurdes d’Europe, favorisent l’entraide et influencent leur organisation sociopolitique dans divers pays.
Pour mieux comprendre l'ampleur des réseaux diasporiques, il faut dépasser le nationalisme méthodologique (Glick Schiller, Çaglar et Guldbrandsen, 2006), qui limite l'analyse des dynamiques sociales des réfugiés à l'échelle de l'État-nation. Ainsi, il est indispensable d'adopter une approche plus large qui examine les pratiques, les communications et les liens au-delà des frontières. Cette démarche nécessite une stratégie méthodologique permettant de concevoir un monde déterritorialisé (Appadurai, 1996).
Méthodologie
Cette étude repose sur une approche qualitative et transnationale. L'un des objectifs consiste à explorer les expériences des réfugiés tout au long de leurs parcours migratoires, raison pour laquelle autant la phase de transit que la phase de réinstallation sont étudiées. Cette perspective s'inspire des recommandations émises par des chercheurs visant à développer des méthodes transnationales afin d'étudier la complexité des parcours des réfugiés (Caron, Rodriguez del Barrio, Blain et Richard, 2022).
Un travail de terrain ethnographique multisite au Québec (Montréal et Laval) et au Liban (Bourj Hammoud et Anjar) a été réalisé. Dans les deux territoires, des entretiens de type récit de vie avec des personnes réfugiées syriennes-arméniennes ont été menés. Les critères de sélection des participants étaient les suivants :
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Syriens-Arméniens au Québec : hommes et femmes de 18 à 65 ans, résidant au Québec depuis au moins un an et ayant été réinstallés à travers le programme de parrainage privé. Uniquement des personnes ayant transité par le Liban avant leur arrivée ont été sélectionnées. L’étude se limite aux personnes parrainées, car ce programme a été majoritairement utilisé par les minorités chrétiennes-syriennes au Québec (Hanley et al. 2018), dont les Syriens-Arméniens (Djerrahian, 2017).
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Syriens-Arméniens au Liban : hommes et femmes de 18 à 65 ans, vivant au Liban depuis au moins 6 mois et souhaitant être réinstallés ailleurs. Le statut migratoire n’a pas été un critère d’exclusion, puisque, techniquement, le Liban n’octroie pas de statut de protection aux réfugiés syriens.
De plus, des entretiens semi-structurés avec des représentants et des intervenants d'organisations et d'institutions religieuses, éducatives et politiques arméniennes au Liban et au Québec ont été réalisés. Leur implication dans le projet a facilité le recrutement de participants réfugiés, car les entités qu’ils représentent ont offert un soutien significatif aux Syriens-Arméniens.
Au total, 21 entretiens de type récits de vie auprès de réfugiés syriens-arméniens ont été effectués, 9 au Québec (7 hommes et 2 femmes) et 12 au Liban (5 hommes et 7 femmes). Les participants sont originaires d’Alep (n=12), Qamishli (n=3), Kessab (n=2), Homs (n=2) et Raqqa (n=2). En moyenne, ils ont passé autour de huit ans en transit. La durée du transit est élevée, car toutes les personnes rencontrées au Liban étaient encore en phase péri-migratoire : elles attendaient toujours une réponse officielle d’ambassades occidentales pour quitter le Liban. Six personnes rencontrées au Liban possédaient le statut de kafala, cinq n’avaient pas de statut régularisé et une personne avait un permis d’études.
Quant aux entretiens menés auprès d’intervenants et de représentants d’organismes et d’institutions arméniennes, six ont eu lieu au Québec et neuf au Liban. Par ailleurs, des observations ethnographiques ont été menées dans les deux territoires (enclaves arméniennes au Liban, églises, écoles, centres de santé et autres lieux pertinents). Ces observations ont complémenté les entretiens en offrant une meilleure compréhension des expériences des réfugiés.
Quant à la méthode d'analyse, les entretiens et les notes de terrain ont été retranscrits. Les données ont ensuite été analysées grâce à un codage thématique dans le logiciel d'analyse qualitative QDA Miner. Cet outil a facilité la réalisation d’une analyse croisée des données, permettant la comparaison de données provenant de diverses sources (des deux contextes, des deux groupes d’interlocuteurs rencontrés, etc.). Cela a permis d'identifier des thèmes émergents et des tendances dans les récits des participants.
Résultats
La présentation des résultats suit les parcours migratoires des réfugiés syriens-arméniens, en explorant leurs expériences à chaque phase.
Phase pré-migratoire
Selon l'ensemble des réfugiés rencontrés, leurs conditions de vie en Syrie étaient favorables avant la guerre. Sur le plan socio-économique, la plupart ont décrit un niveau de vie confortable, possédant leurs propres logements, magasins, usines ou ateliers. Certains ont souligné un accord relatif avec le régime d’Al-Assad, citant la stabilité économique et les libertés culturelles.
De nombreux réfugiés ont mentionné que les Syriens-Arméniens, ainsi que d’autres minorités du pays, étaient perçus comme des alliés du régime par les groupes d’opposition. Cela les a exposés à des persécutions ciblées de la part de groupes islamistes tels que Daesh et Jabhat Al-Nusra, qui sont connus pour leur recours à la violence extrême. De nombreux récits recueillis attestent des situations de violence vécues en Syrie pendant la guerre. Des participants ont partagé leurs expériences, directes ou indirectes, d'enlèvements, de meurtres et de pillages dans les quartiers arméniens, ainsi que de destruction de la culture matérielle arménienne. Ces actes de violence étaient particulièrement répandus à Alep et à Kessab, où les populations arméniennes locales ont été persécutées.
Mon frère a été kidnappé par Daesh en 2012 à Alep, on l’a libéré en payant une grosse somme d’argent.
Serop, 34 ans, réfugié vivant à Beyrouth
Face à cette situation, les participants ont été contraints de quitter la Syrie en urgence, laissant derrière eux leurs biens et parfois même des proches. Quatre personnes ont initialement choisi de se rendre en Arménie, prenant un vol direct Alep-Erevan (lorsqu’il était encore disponible en 2013), avant de rejoindre le Liban quelques mois ou années plus tard. Ces personnes ont finalement préféré aller au Liban en raison de leurs liens familiaux et amicaux dans le pays et car l'Arménie, en tant que petite nation aux ressources limitées, n’était pas en mesure de les accueillir. Les autres participants (n=17) ont voyagé directement vers le Liban par voie terrestre, une traversée souvent complexe et dangereuse. Généralement, ces personnes ont été invitées à se réfugier dans le pays voisin par des proches libanais-arméniens ou des Syriens-Arméniens déjà établis au Liban.
Malgré l'urgence des déplacements, des gages de solidarité ont émergé parmi les Syriens-Arméniens. Par exemple, des réfugiés de Kessab ont raconté comment, après l'invasion et la destruction de leur village, ils se sont dirigés vers Lattaquié, une ville encore épargnée par les combats. Malgré leur arrivée soudaine, ils ont été accueillis par la communauté arménienne locale. Temporairement hébergés dans une église arménienne catholique, ils y ont séjourné plusieurs semaines avant de se rendre au Liban.
Les Arméniens de Lattaquié nous ont aidés en nous donnant des matelas, des choses pour nous couvrir, des meubles, des draps... L’Église catholique arménienne nous a aidés aussi. À Lattaquié, on a connu une famille arménienne qui nous a beaucoup aidés, et je les remercie toujours. Ce sont de bonnes personnes.
Cohar, 42 ans, réfugiée vivant à Anjar
Phase péri-migratoire
Au Liban, il a été constaté que les réfugiés syriens-arméniens se sont principalement installés dans les enclaves arméniennes du pays, soit Bourj Hammoud (Beyrouth) et Anjar (Beqaa). Bien que leur situation dans ces enclaves soit moins précaire que celle des réfugiés syriens vivant dans des camps informels, la grande majorité des participants a connu des épreuves difficiles. Nombreux ont été confrontés à d’importants enjeux, tels que des difficultés liées à l’obtention de la kafala, des salaires bas, un accès limité aux services de santé, des coûts de logement élevés ainsi que de la discrimination. Ces défis ont été accentués par la crise économique et politique au Liban.
De plus, beaucoup passent ou ont passé un temps considérable au Liban en attendant d’émigrer vers d'autres pays. Tous les participants rencontrés au Liban avaient déjà déposé leurs dossiers pour le Canada ou l’Australie, mais attendaient depuis plusieurs années une réponse officielle. En conséquence, certains ont exprimé un sentiment d'impatience et peu d'optimisme quant à leur avenir.
Ici j’ai beaucoup de problèmes et de difficultés. […] Je suis une femme forte, je l’ai été toute ma vie, mais je suis devenue faible au Liban, j’en peux plus. J’ai une vie triste. La seule chose que je souhaite c’est que tu puisses faire entendre mon histoire au Canada.
Anahit, 54 ans, réfugiée vivant à Beyrouth
Malgré les défis, les Syriens-Arméniens ont pu accéder à diverses formes de soutien. Ce soutien a été fourni par leurs réseaux diasporiques arméniens au Liban, c’est-à-dire à travers leurs liens familiaux, amicaux et communautaires ainsi que par des organisations et institutions arméno-libanaises.
Pour accéder à la kafala, plusieurs ont été parrainés par des proches libanais-arméniens (famille proche ou éloignée) ou des amis de longue date. D’autres ont trouvé des opportunités de parrainage par le biais de leurs employeurs (majoritairement des Libanais-Arméniens) ou par l’intermédiaire du principal parti politique arménien du Liban, le Dashnaksutyun.
Mon kafil [parrain] au Liban est un membre de ma famille. Il est Libanais-Arménien, mais il n’est pas de ma famille proche, c’est le cousin de ma mère. Il m’a parrainé pendant trois ans.
Karekin, 32 ans, réfugié vivant à Beyrouth
L'installation dans les enclaves arméniennes au Liban a facilité l'accès à l'emploi, au logement ainsi qu'aux services de santé et d'éducation. Dans ces espaces, les réfugiés ont bénéficié du soutien d'employeurs, de propriétaires proposant des loyers abordables et d'organisations de santé et d'écoles arméniennes offrant des services à des tarifs réduits ou gratuits. Dans ces enclaves, les réfugiés ont pu éviter certaines problématiques rencontrées par les Syriens dans d'autres contextes, comme les couvre-feux et la discrimination.
Les écoles, les clubs sportifs et les églises arméniennes ont joué un rôle crucial en facilitant la socialisation des réfugiés, notamment des jeunes. Plusieurs participants ont mentionné avoir rencontré des amis dans ces espaces. En plus de fournir des denrées alimentaires et des ressources matérielles aux familles réfugiées, les organisations et les institutions arméno-libanaises ont parfois embauché des réfugiés possédant une expertise professionnelle significative, tels que des enseignants ou d'autres cadres.
Les premiers mois, j'étais désespéré, car je ne trouvais pas d’emploi au Liban. Mais grâce à un ami, j'ai rencontré un Arménien qui possédait un garage à Bourj Hammoud. Je lui ai alors dit que je réparais des voitures en Syrie, et il a aimé mon travail. J'ai travaillé avec lui pendant deux ans et demi.
Ara, 58 ans, réfugié réinstallé à Laval
Nous obtenons tous nos médicaments au Centre de santé Karagheusian. Si le Centre Karagheusian ferme, c'est la catastrophe pour nous, vraiment... Si ce n'était pas pour Karagheusian, nous serions déjà morts.
Karekin, 32 ans, réfugié vivant à Beyrouth
Enfin, un soutien essentiel a émergé concernant les possibilités de réinstallation au Canada et en Australie. Selon plusieurs participants, les nouvelles sur le parrainage se sont rapidement répandues, même en Syrie. Certains sont même venus au Liban uniquement pour déposer leurs dossiers, après avoir été informés par des proches déjà établis au Québec. Pour d'autres, les informations sont arrivées plus tard, alors qu'ils étaient déjà au Liban. En général, ils ont obtenu ces renseignements grâce à leur famille, leurs amis ou par d'autres réfugiés syriens-arméniens ayant déjà déposé leurs dossiers ou étant déjà réinstallés au Québec.
Mon amie Aline est venue au Liban en 2015. Elle vit au Canada depuis 20 ans, donc nous avons commencé à discuter. Aline m'a parlé du programme de parrainage. Elle a dit que nous avions besoin d'un parrain au Canada, alors j'ai contacté les filles d'une cousine de ma mère qui vivent à Montréal. Elles m'ont dit qu'elles pouvaient m’aider.
Anahit, 54 ans, réfugiée vivant à Beyrouth
Phase post-migratoire
Malgré la réinstallation dans un territoire sécuritaire comme le Québec, les réfugiés syriens-arméniens ont rencontré divers défis. Les difficultés les plus fréquemment mentionnées ont été les barrières linguistiques, la déqualification, la perte de statut socio-économique et la séparation familiale. Dans quelques cas, les réfugiés sont arrivés avec des séquelles psychologiques importantes. Certains professionnels qui ont accompagné les réfugiés ont témoigné de leur détresse émotionnelle.
En raison des pertes matérielles durant la guerre et des longs séjours au Liban, la plupart sont arrivés au Québec dans des conditions économiques instables. Malgré une allocation mensuelle versée par leurs parrains pour subvenir à leurs besoins, cette somme s’est rapidement avérée insuffisante. Nombreux ont donc cherché des emplois dès leur arrivée, limitant la réalisation d'étapes d’adaptation importantes, en particulier la francisation.
Certains ont été contraints d'accepter des emplois mal rémunérés et pour lesquels ils étaient surqualifiés. Par exemple, Vartan, ingénieur qui possédait sa propre usine à Alep, a dû travailler comme ouvrier dans une usine métallurgique à Montréal, faute d’alternatives dans son réseau à l’arrivée. Selon Vartan, les conditions de travail dans cette usine n'étaient pas sécuritaires, ce qui a entraîné une blessure à sa main.
Un ami, un Arménien d’Iraq, travaillait dans cette compagnie. Quand je lui ai dit que je cherche un emploi, il m’a dit d’aller essayer. J’avais besoin d’argent, d’un emploi, j’ai une famille, et j’ai commencé là-bas, mais la compagnie est la pire entreprise au monde. Paie minimum et je me suis blessé. Pas professionnelle du tout. Même en Syrie tu ne trouves pas une entreprise comme celle-là.
Vartan, 59 ans, réfugié réinstallé à Montréal
Malgré les défis d’adaptation au Québec, les Syriens-Arméniens ont pu bénéficier de diverses formes de soutien. Comme au Liban, ils ont trouvé de l’aide au sein de leurs réseaux diasporiques arméniens, que ce soit par le biais des parrains, de la famille, des amis ou des organisations et institutions arméno-québécoises.
Quant au travail, dans la plupart des cas, les réfugiés ont réussi à trouver des opportunités d’emploi au sein de leurs réseaux arméniens, en particulier par l’entremise de leurs parrains et d'autres Syriens-Arméniens déjà établis au Québec (famille proche et éloignée, amis, anciens voisins en Syrie, etc.).
J’ai trouvé mon emploi grâce à mon ami d’Alep. Il était mon voisin en Syrie. Nous sommes de la même rue, même école, de la même communauté […] Il m’a dit qu’il y a une opportunité d’emploi dans cette usine à Montréal et j’ai aimé.
Narek, 31 ans, réfugié réinstallé à Laval
Parfois, les réseaux arméniens ont même permis de contrer la déqualification. C’est le cas d’Ara et de Hagop, experts en mécanique automobile et industrielle respectivement. Grâce à des contacts syriens-arméniens déjà établis au Québec, ils ont trouvé un emploi dans leur domaine dès leur arrivée.
Avant d’arriver, mon cousin a commencé à dire aux Arméniens de Montréal « si vous avez besoin d’un professionnel dans l’industriel, mon cousin s’en vient ». Donc, quelques jours après mon arrivée j’ai commencé à travailler. J’aurais pu travailler dès la première journée, mais je n’avais pas encore la RAMQ.
Hagop, 60 ans, réfugié réinstallé à Montréal
Malgré la crise du logement au Québec, plusieurs personnes ont trouvé des logements relativement abordables grâce à leurs familles et amis. Dans certains cas, des organisations arméniennes ont également assisté les réfugiés dans la recherche de logements abordables. Souvent, les réfugiés ont été logés chez leurs parrains ou leurs proches durant les premiers mois, en attendant d'avoir les moyens pour trouver un appartement. Généralement, les réfugiés se sont installés dans des arrondissements à forte présence arménienne, comme Saint-Laurent, Ahuntsic-Cartierville (Montréal) et Chomedey (Laval).
Nous sommes restés cinq mois chez mon cousin à Montréal. Ils nous ont accueillis jusqu’à que nous trouvions notre appartement.
Vartan, 59 ans, réfugié réinstallé à Montréal
Les réseaux arméniens ont également aidé à contrer l’isolement et à offrir du soutien émotionnel. Des liens de confiance se sont aussi formés au sein des associations et des églises arméniennes. Plusieurs réfugiés ont mentionné fréquenter régulièrement ces espaces, où ils ont rencontré des Syriens-Arméniens et d'autres membres de la communauté arménienne.
Nous sommes 10 ou 15 familles syriennes-arméniennes dans notre quartier, et nous sommes tous amis. Nous nous sommes connus dans une église arménienne proche d’ici. On va à l’église, on se connaît, on fait d’autres amis, on s’entraide.
Raffi, 40 ans, réfugié réinstallé à Montréal
Outre les opportunités de parrainage, les organisations communautaires et les églises ont aussi offert des dons importants de meubles et de vêtements d'hiver aux réfugiés. Les écoles arméniennes ont quant à elles offert des bourses d'études, organisé des classes d'accueil et facilité l'accès à des services psychosociaux en langue arménienne pour les enfants traumatisés par la guerre. Ces espaces ont également favorisé l'intégration et le développement de liens de confiance chez les jeunes.
Dans le but de synthétiser les résultats de l’étude, le tableau 1 ci-dessous expose les différents types de soutien dont ont bénéficié les réfugiés grâce à leurs réseaux diasporiques.
Tableau 1
Types de soutien fournis au sein des réseaux diasporiques des Syriens-Arméniens
Discussion et conclusion
Les parcours migratoires des réfugiés syriens-arméniens sont jalonnés de nombreux défis, mais les réfugiés ont réussi à mobiliser leurs réseaux diasporiques pour assurer leur survie, obtenir du soutien et saisir des opportunités de réinstallation.
Cette recherche met en évidence comment la dispersion diasporique arménienne a guidé les parcours migratoires des réfugiés syriens-arméniens, déterminant à la fois les routes employées et les destinations visées, ce qui corrobore les constatations d’autres études portant sur les réseaux des réfugiés (Hanley et al., 2018; Suter et Magnusson, 2015). Les participants se sont dirigés au Liban et au Québec, des territoires où des communautés arméniennes sont solidement établies et peuvent offrir une assistance. Cela explique aussi le choix de s’installer dans des enclaves arméniennes ou dans des zones à forte présence arménienne. Leurs expériences dans ces zones confirment les observations d’autres recherches portant sur les avantages des enclaves ethniques (Lincoln et al., 2021), notamment en termes d’accès à l’emploi, au logement et aux services essentiels (santé et éducation).
L’étude souligne aussi l’importance des réseaux diasporiques en tant que sources de soutien pour les réfugiés. Une forte solidarité perdure entre les communautés arméniennes malgré leur dispersion, où des informations, des ressources, des contacts et des opportunités sont partagés régulièrement (Wahlbeck, 2002). Il est toutefois nécessaire de considérer le contexte structurel et historique plus large (Faist, 2009; Iosifides, 2002), car il explique la solidarité entre les communautés arméniennes et leur capacité à soutenir les réfugiés, particulièrement au Liban et au Québec. Les communautés arméniennes ont une longue histoire d'ancrage dans ces deux territoires, et une importante tradition d'organisation communautaire. Le soutien fourni au sein de ces communautés semble aussi plus important dans des contextes où l’État fournit peu de soutien aux réfugiés, comme au Liban, avec un gouvernement qui n’octroie presque aucun service aux Syriens, et au Québec, où un programme de parrainage privé a été mis de l’avant.
Les réseaux de soutien des Syriens-Arméniens sont majoritairement composés de réseaux diasporiques, formés à partir de liens de cohésion et de liaison. Les liens de connexion (interculturels), toutefois, sont nettement moins développés, constat également observé dans d’autres études portant sur des populations réfugiées au Canada (Hanley et al., 2018; Lamba et Krahn, 2003). Cette observation s'applique également à la phase de transit au Liban, où les réseaux diasporiques arméniens ont aussi joué un rôle prépondérant. Cela peut être attribué au contexte hautement sectarisé au Liban, où chaque communauté ethnoreligieuse dépend de ses propres ressources et organisations (Madoré, 2016). Comme le soulignent d’autres recherches (Garrido et Olmos, 2006), la dépendance excessive des réfugiés à leurs réseaux ethniques (diasporiques dans ce cas) peut entraîner leur isolement social, et même les piéger dans des situations de sous-emploi, comme cela a été observé dans certains cas au Québec.
Les liens de liaison, créés auprès d’organisations et d’institutions arméniennes, sont des sources importantes de soutien pour les réfugiés syriens-arméniens. Grâce à ces entités, ils ont pu accéder à des services essentiels, trouver des opportunités pour régulariser leur statut migratoire ainsi que réduire l’isolement. En fréquentant des lieux comme les églises arméniennes, ils ont pu tisser des liens avec d’autres réfugiés ou membres de la communauté arménienne. À l’image d’autres études (Wang et Handy, 2014), notre recherche a démontré que ces espaces renforcent la résilience des réfugiés.
Enfin, notre étude souligne l'importance d'appréhender les expériences des réfugiés pendant la guerre, le transit et la réinstallation, afin de mieux comprendre leurs parcours migratoires. Comme le suggèrent d’autres chercheurs (Caron et al., 2022; Suter et Magnusson, 2015), il faut continuer à développer des méthodes permettant d’étudier les réalités des réfugiés dans leur globalité. L’ethnographie multisite, suivant les réfugiés d’un territoire de transit à celui de réinstallation, pourrait être une approche prometteuse à prioriser.
Appendices
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List of tables
Tableau 1
Types de soutien fournis au sein des réseaux diasporiques des Syriens-Arméniens