Les lois qui régissent l’élection des parlements et des présidents sont des ensembles complexes fourmillant de règles d’importance inégale. De toutes ces règles, la plus névralgique est celle qui permet de déterminer qui sortira vainqueur de la compétition : on appelle généralement cette règle le système électoral, ou encore le mode de scrutin. Les systèmes électoraux constituent une préoccupation ancienne de la science politique. On y voit volontiers une composante essentielle de tout régime politique dans la mesure où on lui prête, parfois avec excès, le pouvoir de configurer le paysage politique d’un pays dans un sens ou dans l’autre, de freiner la participation électorale ou au contraire de la stimuler, de conditionner la féminisation des postes électifs, etc. L’analyse comparative dément parfois les généralisations hâtives des uns et des autres. La diversité des systèmes électoraux existant dans les pays démocratiques était et demeure très grande. Qui croit avoir fait le tour du jardin en ce domaine ne manquera pas de constater que l’imagination politicienne est inépuisable. On cherchera dans ce texte à classer les systèmes existants de façon intelligible et à en décrire le fonctionnement. Dans la lignée de travaux antérieurs, nous identifions trois règles de base délimitant autant de familles de systèmes : ceux qui reposent sur la pluralité, ceux qui recherchent une majorité absolue et ceux qui visent à procurer aux divers partis en lice une représentation proportionnelle au nombre de voix obtenues. Cette division ternaire est loin d’épuiser le sujet, vu l’existence d’une quatrième famille de systèmes, les formules mixtes, cherchant à combiner la troisième de ces règles avec l’une des deux premières. Il y a deux bonnes raisons de présenter en premier lieu le scrutin à la pluralité des voix, appelé dans le monde francophone majoritaire à un tour : c’est historiquement le plus ancien de tous et, pédagogiquement, c’est le plus simple à expliquer et à comprendre. Est élu le candidat qui obtient dans sa circonscription un nombre de voix plus élevé que chacun de ses concurrents individuellement considéré. L’expression anglaise consacrée, first-past-the-post, est éloquente : elle évoque une course de chevaux dont l’un se détache du peloton en fin de parcours pour franchir le fil d’arrivée et décrocher la victoire, reléguant les autres dans l’oubli. La pluralité est encore utilisée aujourd’hui dans une minorité de pays, comme le Mexique et les Philippines, pour désigner le vainqueur d’une élection présidentielle. Pour l’élection des députés, elle prend habituellement, mais pas toujours, la forme d’un scrutin uninominal : il y a autant de circonscriptions territoriales que de sièges à pourvoir dans l’assemblée et chacune élit un seul député. C’est sous cette forme que le scrutin pluralitaire opère le plus souvent dans le monde démocratique contemporain, avec pour archétypes les États-Unis, la Grande-Bretagne et le Canada. Rien n’empêche cependant que le scrutin soit plurinominal, c’est-à-dire que la règle de pluralité s’applique dans des circonscriptions élisant plusieurs députés. Il est aussi possible que chaque parti présente une liste de candidats et tous les sièges vont à la liste en avance ou encore que les candidats se présentent individuellement, l’électeur dispose d’autant de voix qu’il y a de sièges à pourvoir, et les candidats ayant obtenu le plus de voix sont déclarés élus. Cette dernière modalité permet l’élection éventuelle de candidats appartenant aux partis minoritaires. Très facile à expliquer et à comprendre dans son principe, le scrutin à la pluralité des voix rend difficile la prédiction de la répartition des sièges lors d’une élection législative. Les sondages menés à l’échelle nationale et régionale, s’ils sont bien faits, permettent d’anticiper la répartition globale des appuis à chaque …
Appendices
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