Abstracts
Résumé
L’objectif de cet article est d’évaluer et d’analyser le potentiel commercial des pays de la CEMAC selon l’approche de l’intégration économique par le marché. Pour y parvenir, nous adoptons une démarche en plusieurs étapes. Après une analyse des faits stylisés, un modèle de gravité est appliqué et estimé selon plusieurs variantes pour évaluer les déterminants des échanges commerciaux. Les résultats obtenus sont ensuite utilisés pour le calcul du potentiel commercial communautaire. Nous parvenons aux principaux résultats suivants : (i) les faits stylisés montrent que les pays de la CEMAC sont faiblement intégrés commercialement, extravertis et hétérogènes; (ii) les coefficients des variables traditionnelles du modèle de gravité sont globalement de signes attendus; (iii) le faible niveau de revenu par habitant et surtout la faible diversification productive réduisent fortement le potentiel commercial dans la sous-région; (iv) des épisodes de création d’échanges, quoiqu’à un niveau faible, apparaissent, notamment dans les flux bilatéraux du Cameroun avec les autres États membres.
Abstract
This paper aims to evaluate and analyze trade potential of Monetary and Economic Community of Central Africa’s countries (MECCA) in the light of market integration theory. Gradually, we analyze stylized facts of member’s countries trade and estimate an augmented gravity model to evaluate the bilateral trade patterns in the subregion. The results obtained are used to compute the trade potential index in the community. The study found four major results: (i) the stylized facts show heterogeneity and a low level of integration in the subregion; (ii) the coefficients of the traditional variables of the gravity model globally keep their theoretical signs; (iii) the poor level of GDP per capita and the lack of diversification of productive structures are the main factors reducing trade potential in the sub-region; (iv) even though weak, there is some trade creation episodes, notably in the bilateral flows of Cameroon and others member’s countries.
Article body
Introduction
La CEMAC[1] est reconnue comme l’une des sous-régions les moins intégrées commercialement d’Afrique. Pourtant, elle est située aux confins de presque toutes les autres Communautés économiques régionales (CER) du continent. Malgré cette position stratégique, des avancées récentes en matière d’élimination des droits de douanes et l’existence d’une monnaie unique, les résultats en termes de flux commerciaux et diversification des exportations restent encore très faibles. Les statistiques officielles et les études empiriques confirment bien cette réalité (Carrère, 2013). Ainsi, par exemple, la part du commerce intracommunautaire est restée relativement stable entre 1980 et 2003, avec un commerce estimé, en moyenne, à 1,5 %, malgré quelques épisodes de légère hausse observés notamment en 1990 (2,3 %) et 1995 (2,1 %). Les estimations récentes montrent que cette tendance ne semble pas s’inverser durablement. À titre de comparaison, sur la même période, la moyenne de cet indicateur est de 65,87 % pour l’UE (Union européenne), 48,28 % pour l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain), 21,32 % pour l’ASEAN (Association des nations du Sud-Est asiatique), 13,98 % pour le MERCOSUR (Marché commun du Cône Sud) et 10,83 % pour le CARICOM (Marché commun des Caraïbes).
Les explications de ce faible commerce intra-CEMAC sont également assez bien connues dans la littérature empirique. Sans prétendre à l’exhaustivité, nous retenons les trois suivantes : (i) une structure productive hyperspécialisée dominée par l’exploitation de quelques matières premières notamment le pétrole (en moyenne près de 80 % dans le total des exportations), conséquence d’une faible diversification des exportations; (ii) une forte extraversion[2] du commerce extérieur, dictée par la disponibilité géographique des ressources naturelles et essentiellement orientée vers l’Europe, qui y concentre toujours une part importante malgré la montée en puissance des pays du BRICS, et notamment la Chine; (iii) un faible développement du capital infrastructurel, avec pour conséquence une faible intégration par le marché, etc.
Pour ce qui concerne plus spécifiquement la concentration[3] (diversification) du commerce, les données laissent généralement transparaître une forte concentration (faible diversification) des exportations et une faible concentration (forte diversification) des importations. Sur la période 1995-2011 en moyenne, l’indice de concentration des exportations est de 0,39 au Cameroun, 0,79 au Tchad, 0,73 au Gabon, 0,74 au Congo, 0,76 en Guinée équatoriale et 0,45 en République centrafricaine (RCA), soit une moyenne sous-régionale de 0,64. Relativement aux importations, le niveau de concentration est de 0,15 au Cameroun, 0,10 au Tchad, 0,07 au Gabon, 0,12 au Congo, 0,21 en Guinée équatoriale et 0,12 en RCA, soit une moyenne sous-régionale de 0,12. Ces résultats démontrent que les pays de la CEMAC exportent généralement un petit nombre de produits, mais importent relativement un grand nombre de produits. Cette situation explique la faible participation d’une part et la forte dépendance d’autre part des pays de la sous-région au commerce international.
Pour adresser ces différents problèmes, les autorités communautaires avec l’aide des bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux ont entrepris depuis le début des années 1990, un vaste programme de réformes. La mutation la plus importante a été sans doute la création de la CEMAC, qui a remplacé l’Union douanière et économique de l’Afrique centrale (UDEAC) créée en 1964. La création de la CEMAC est apparue comme une réponse appropriée aux difficultés financières rencontrées par ses membres au milieu des années 1980, et qui ont affecté durablement et paralysé les activités de l’UDEAC pendant près d’une décennie. La CEMAC est désormais en charge de l’implémentation de toutes les autres réformes. Ainsi, sur le plan commercial, il s’agit notamment de la réduction ou de la suppression des tarifs et obstacles non tarifaires, de l’adoption des règles d’origine et d’un tarif extérieur commun (TEC), le renforcement du système d’information commerciale, l’amélioration des infrastructures physiques, la promotion des investissements, la facilitation des systèmes de paiement, la libre circulation des personnes et des biens, etc. avec pour finalité de stimuler la compétitivité de la production locale pour satisfaire la demande des marchés locaux, communautaires et internationaux.
Sur le plan théorique, l’idée de promouvoir l’intégration sous-régionale comme une stratégie pour accélérer la croissance économique à travers les effets de création et de détournement de commerce qu’elle induit n’est pas nouvelle (Viner, 1951). Elle a rapidement trouvé des champs d’application aussi bien en Europe qu’en Afrique, où elle a émergé avec les années d’indépendance, et depuis évolue désormais en dents de scie avec des périodes d’euphorie et de lassitude. Plusieurs formes d’intégration sont généralement développées : réelle, monétaire, politique, etc. Plus spécifiquement, pour ce qui concerne l’économie réelle, son implémentation se fait notamment soit par l’intégration de la production, soit par celle du marché. Cet article porte particulièrement sur la dernière forme d’intégration, entendue comme « l’abolition des barrières nationales dans les transactions économiques entre les États membres d’un bloc, afin que les facteurs de production puissent y circuler librement » (CEA, 2000).
L’une des spécificités des pays de la CEMAC est qu’ils participent avec ceux de l’Union monétaire ouest-africaine[4] (UEMOA) et la République des Comores à une union monétaire avec la France, à travers les accords de coopération qui leur donnent un accès illimité à des devises, garantissant ainsi le maintien de la parité du franc comorien et des deux francs CFA vis-à-vis de l’euro[5]. Or, selon la théorie récente des zones monétaires optimales développée particulièrement par Frankel et Rose (1998) et Rose (2000) dans une approche désormais qualifiée d’endogène dans la littérature, contrairement à l’ancienne approche dite exogène développée principalement par Mundell (1961), McKinnon (1963) et Kenen (1969), les pays ayant précédé leur intégration réelle par une union monétaire ont tendance à commercer trois fois plus que ceux n’appartenant pas à une union monétaire. Bien plus, leurs cycles ont également tendance à être synchronisés en raison de la similarité des chocs induite par l’intensité commerciale. L’accroissement du commerce prédit par Frankel et Rose suppose l’existence d’un potentiel commercial, qui traduit l’idée selon laquelle les entraves et contingentements limitent les possibilités de commerce. Autrement dit, le potentiel commercial exprime le niveau maximum de commerce que les pays sont capables d’atteindre s’ils utilisent pleinement toutes leurs capacités commerciales. Ce niveau dépend théoriquement de plusieurs facteurs, entre autres la richesse par habitant du pays, les dotations naturelles, les dispositions institutionnelles, les complémentarités productives, le capital infrastructurel, etc.
Sur le plan empirique, le modèle de gravité est apparu comme un outil pertinent pour la vérification de ces développements théoriques. En Afrique, ses premières applications ont consisté soit à évaluer le commerce réellement observé (Foroutan et Pritchett, 1993), soit tout simplement à estimer les déterminants de celui-ci (Carrère, 2002; Avom, 2005; Gbetnkom, 2006; Agbodji, 2007). Ainsi, à notre connaissance, très peu de travaux se sont intéressés à l’évaluation du potentiel commercial des pays africains. Selon toute vraisemblance, il n’existerait aucune étude spécifique à la CEMAC. Ceux ayant abordé cet aspect de la question ont essentiellement ciblé les pays de l’UEMOA (Gbetnkom et Avom, 2005) et ceux du Maghreb (Achy, 2006). En ce qui concerne le premier travail, les résultats montrent, pour les pays de l’UEMOA, que le commerce prédit est globalement supérieur au commerce effectif. Même si les pesanteurs et les contraintes citées ci-dessus semblent a priori plaider pour un faible niveau de cet indicateur dans la CEMAC, une telle intuition devrait tout de même être empiriquement vérifiée. C’est l’objectif que se fixe cet article.
Les analyses conduites dans cet article montrent que le commerce entre la CEMAC et ses partenaires stratégiques (UE, Chine) augmente rapidement à partir de 2003, contrairement au commerce intrazone. Bien plus, de toutes les communautés d’Afrique (Common Market for Eastern and Southern Africa (COMESA), UMA et UEMOA par exemple), la CEMAC apparaît comme celle dont le commerce intrazone est le plus faible. Relativement aux déterminants du commerce bilatéral, il ressort que les coefficients associés aux variables traditionnelles et aux variables muettes de contrôle sont globalement de signes attendus et significatifs. En ce qui concerne le potentiel commercial, les résultats montrent un faible niveau de cet indicateur. Toutefois, des épisodes de création d’échanges prédominent malgré leur faiblesse. Ce résultat pourrait illustrer le fait que les pays aient déjà exploités tous leurs efforts dans le commerce intrazone. Cette situation peut aussi refléter la faible diversification productive des pays membres et l’absence de politique volontariste en matière d’intégration par le marché. Un autre argument serait le faible revenu par tête des pays, ce qui n’encouragerait pas leurs échanges internes et même internationaux.
La structure de cet article se présente, à la suite de cette introduction en quatre points, de la manière suivante. Dans la section 1, nous présentons les faits stylisés sur le commerce communautaire de la CEMAC ainsi que son évolution internationale. La section 2 présente quant à elle le modèle empirique ainsi que la méthodologie de calcul du potentiel commercial. La section 3 est consacrée à la présentation des techniques d’estimation économétriques, les résultats y étant également présentés et interprétés. Une conclusion est proposée dans la quatrième section, où sont repris les principaux enseignements et les recommandations de politique économique.
1. Le commerce de la CEMAC : quelques faits stylisés
L’observation des statistiques officielles relatives au commerce extérieur des pays de la CEMAC entre 1995 et 2010, laisse apparaitre trois faits stylisés majeurs qui sont par ailleurs assez récurrents depuis les années 1960. Le premier est relatif à l’évolution de ses principaux partenaires, où l’Europe dont la France en tête, malgré la percée chinoise, y demeure toujours le principal partenaire commercial. Le deuxième est relatif au statisme des échanges intracommunautaires qui évoluent faiblement et place de ce fait la CEMAC derrière toutes les autres CER du monde. Le troisième est relatif aux tendances dynamiques internes et externes du commerce de la CEMAC, dictées par les dotations naturelles et ne résultant pas d’une stratégie de diversification ou politique d’ouverture.
1.1 Un commerce extérieur toujours dominé par l’Europe, malgré la percée de la Chine
Les graphiques 1 et 2 retracent l’évolution (aussi bien en volume que selon les partenaires) récente du commerce extérieur des pays de la CEMAC. Ainsi, depuis 1995, le graphique 1 montre une croissance régulière du volume du commerce extérieur. Il convient de relever que cette date coïncide avec la mise en place de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et l’accélération des politiques de libéralisation commerciale. Bien que la tendance historique soit bien respectée avec la première place occupée par l’Europe, le fait marquant est la percée de la Chine qui se situe dans une dynamique générale de l’évolution récente de son commerce avec l’Afrique. À titre d’illustration, entre 2000 et 2010, les exportations de la Chine vers l’Afrique au sud du Sahara ont crû au taux annuel moyen de 31 % contre un taux de croissance de ses exportations vers l’ensemble du monde de 23 %. Les chiffres correspondants pour les importations sont respectivement 34 % et 21 %. En dépit de cette formidable croissance, l’Afrique demeure un petit partenaire pour la Chine (en 2010, 2,8 % de ses exportations et 4,3 % de ses importations). À l’inverse, depuis 2009, la Chine est devenue le plus important partenaire commercial de l’Afrique au sud du Sahara : les exportations africaines vers ce pays constituent, en 2010, 18 % des exportations totales africaines et les importations, 14 %[6]. Malgré le fléchissement observé en 2008 à cause de la crise financière internationale, la tendance est à la reprise.
Cette évolution a été rendue possible grâce à une rupture brutale en matière de politique économique. En effet, depuis 1978, année où la Chine a véritablement commencé sa politique d’ouverture, elle a immédiatement engagé une politique de diversification de ses exportations afin de garantir son approvisionnement en matières premières, nécessaire pour soutenir une croissance économique forte et durable. Dans le but d’opérationnaliser cette nouvelle stratégie, la Chine s’est rapidement tournée vers l’Afrique, particulièrement à partir du premier Forum de coopération Chine-Afrique en 2000. À partir de cette date, le commerce entre la Chine et l’Afrique au sud du Sahara s’accroît d’une manière générale plus vite que le commerce de la Chine avec le reste du monde. Le graphique 1 montre comment le commerce de la Chine avec les pays de la CEMAC se rapproche de celui de l’Europe, malgré le fléchissement dû à la crise observé entre 2007 et 2008, et devance celui de l’Afrique depuis l’année 2003. Il est fort probable que l’Europe soit à son tour devancée par la Chine dans les prochaines années.
Sur la même sous-période, le graphique 2 révèle que les principaux partenaires de la CEMAC en termes d’importations sont l’UE, suivie de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’ALENA. La CEMAC se positionne comme la quatrième région d’origine de ses propres importations, conséquence de sa faible diversification et notamment de la similitude des structures productives nationales. En ce qui concerne la destination des exportations, l’ALENA occupe la première position, suivie de l’UE. Toutefois, la CEMAC vient en troisième position, mais affiche un niveau très faible relativement aux deux premiers. Ces statistiques montrent une fois de plus que le processus d’intégration par le marché dans la sous-région est extrêmement lent.
1.2 Un commerce caractérisé par le statisme des échanges internes
Le deuxième fait historique récurrent, c’est que la CEMAC apparaît comme l’une des sous-régions les moins intégrées au monde. Sur la même période, le graphique 3 confirme bien cette réalité. En effet, les statistiques du commerce total intracommunautaire classe la zone en dernière position comparativement à certaines Communautés d’Afrique comme le COMESA, l’UMA et même l’UEMOA. La comparaison est assez intéressante avec l’UEMOA, dont les pays sont également membres de la Zone franc. Les chiffres moyens sur la période 1995-2010 montrent que le commerce interne de l’UEMOA est d’environ 4,26 fois supérieur à celui de la CEMAC. Avec le COMESA, ce rapport passe à environ 10 fois.
Relativement au statisme des échanges, la part du commerce interne de la CEMAC par rapport à son commerce total est de 1,2 % en 2004, 0,4 % en 2005, 1,3 % en 2006, 1,1 % en 2007, 0,8 % en 2008 et 1,1 % en 2009, soit une moyenne périodique de 0,98 %. Cette faible évolution confirme les difficultés d’intégration par le marché dans la CEMAC. En comparant cette performance à celles des autres groupements commerciaux africains sur la même période, il apparaît qu’elle est la plus faible (voir tableau 1). À titre d’exemple, la moyenne des exportations intrazones par rapport aux exportations totales est de 5,25 % pour le COMESA, 9,18 % pour la CEDEAO, 11,23 % pour la SADC et 13,93 % pour l’UEMOA, avec généralement des trends croissants.
1.3 Une dynamique du commerce disparate et dominée par l’exploitation des matières premières notamment le pétrole
Le graphique 4 affiche des disparités quant à l’évolution des taux de croissance moyens du commerce de la CEMAC. La moyenne du taux de croissance des importations venant du reste du monde montre que la Guinée équatoriale est le seul pays qui marque une forte progression avec un niveau moyen qui est de 47,70 %. Les performances des autres pays sont inférieures à 20 %. Ce niveau traduit toutefois une extraversion ou une dépendance des pays de la CEMAC vis-à-vis des produits étrangers. Pour ce qui concerne les exportations, leur progression se fait presque dans les mêmes proportions dans les pays membres, mais avec quelques exceptions. En raison de l’exploitation récente du pétrole, la Guinée équatoriale (44,86 %) et le Tchad (35,26 %) enregistrent une forte progression. Les niveaux moyens des autres pays sont respectivement de 6,89 % pour le Cameroun, 11,79 % pour le Gabon, 16,86 % pour le Congo et 0,22 % pour la République centrafricaine. En effet, selon les statistiques de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), la composition des exportations dans la CEMAC est largement dominée par le pétrole. À titre d’illustration, le pétrole et ses dérivés ont occupé en 2006 au moins la moitié des exportations des pays producteurs : 50 % au Cameroun, 83 % au Gabon, 87 % au Tchad, 91 % en Guinée équatoriale et 92 % au Congo, soit une moyenne sous-régionale de 82 %.
Le graphique 5 montre les évolutions entre 2000 et 2010 du commerce de chaque pays avec la communauté. Ces évolutions sont également contrastées. En matière d’importation, seuls le Cameroun et le Tchad affichent des scores satisfaisants. Toutefois, si le Tchad maintient une tendance haussière, le Cameroun affiche un essoufflement notamment après 2008. Les pays tels que le Gabon, le Congo et la RCA, bien qu’ayant des niveaux faibles d’importations intrazone, affichent des trends positifs. En revanche, la Guinée équatoriale reste le seul pays qui affiche une baisse continue de ses importations venant de ses partenaires sous-régionaux, après le saut quantitatif de 2006. En ce qui concerne les exportations, seul le Cameroun affiche une évolution croissante, continue et soutenue dans le temps. La Guinée équatoriale semble globalement suivre la même tendance, mais avec toutefois une évolution irrégulière. Le Gabon, malgré un faible niveau d’exportations garde une croissance régulière sur toute la période d’étude, alors que le Congo, dont le commerce se situe dans les mêmes proportions, garde une tendance presque stationnaire. La RCA et le Tchad restent les seuls pays dont la contribution aux exportations sous-régionales est presque nulle.
Ces faits stylisés bien que suffisamment instructifs appellent tout de même, afin de tirer des conclusions rigoureuses et robustes, une analyse économétrique dont la modélisation est présentée ci-dessous.
2. Le modèle empirique : justification et spécification
Le modèle de gravité sera utilisé pour estimer les déterminants des échanges et calculer le potentiel commercial. Nous rappelons ses fondements théoriques, présentons sa spécification ainsi que la justification des variables retenues et de la méthode d’estimation du potentiel commercial.
2.1 Les fondements théoriques du modèle de gravité
Jusqu’au début des années 1990, les fondements théoriques du modèle de gravité étaient rares. L’on doit toutefois à Tinbergen (1962), Pöyhönen (1963), Linneman (1966), puis Bergstrand (1985) les premières justifications fondées sur la théorie microéconomique. Par la suite, Krugman (1991 et 1992) ouvrira une voie qui va s’avérer très rapidement féconde dans le commerce international et la nouvelle économie géographique. De manière générale, l’équation de gravité s’applique dans un contexte monopolistique qui suppose des rendements d’échelle croissants et la différentiation des produits. Le cadre d’analyse est sous-tendu par trois hypothèses fondamentales : (i) la maximisation des profits par les firmes en concurrence monopolistique, (ii) la maximisation sous contrainte de l’utilité par les consommateurs, et (iii) la spécialisation de l’offre de biens entre pays (Anderson, 1979; Bergstrand, 1989; Anderson et van Wincoop, 2003; Helliwell et Schembri, 2005). Mais ce cadre d’analyse est inapproprié avec la réalité du commerce bilatéral dans la CEMAC, en raison notamment de l’inexistence de grands groupes appartenant à ces pays. Pour cette raison, d’autres fondements sont mobilisés dans le cadre de cet article. Ainsi, pour Oguledo et MacPhee (1994), le modèle de gravité trouve ses fondements dans l’analyse microéconomique à l’aide d’un système linéaire de dépenses. Deardorff (1998) démontre pour sa part que le modèle de gravité peut être dérivé d’un contexte général indépendant de tout modèle de commerce international. Quant à Evernett et Keller (2002), c’est la théorie de la spécialisation de Heckscher-Ohlin dans un contexte de rendements d’échelle croissants qui justifie l’équation de gravité. Harrigan (2003) justifie les fondements de l’équation de gravité par le volume de commerce entre les pays concernés, pendant que Helpman et al. (2008) s’inspirent d’un contexte d’hétérogénéité des firmes.
À la suite de cette diversité de fondements, il ressort que l’application du modèle de gravité dans la CEMAC serait plus liée à un contexte général indépendant de tout modèle de commerce international (Deardorff, 1998), ou au niveau du (faible) volume de commerce bilatéral entre les pays concernés (Harrigan, 2003).
2.2 Le modèle de gravité : spécification empirique et justification des variables
Empiriquement, l’équation de gravité est dérivée de la physique newtonienne de gravitation qui énonce que « deux corps s’attirent en raison proportionnelle de leurs masses et en raison inverse du carré de la distance qui les sépare »[7]. La première application en économie a été l’oeuvre de Tinbergen (1962). Dans ce travail, nous utilisons un modèle de gravité selon la spécification théorique proposée par Anderson et van Wincoop (2003). Pour ces auteurs, les consommateurs ont des préférences de type CES (constant elasticity of substitution) avec une élasticité de substitution commune à tous les biens et supérieure à l’unité (σ > 1). Dans cette perspective, l’équation de gravité peut prendre la forme suivante :
Yi et Yj sont les PIB des pays partenaires au commerce et Yw le PIB mondial. tij représente les coûts du commerce du pays i vers le pays j. Si l’hypothèse de la symétrie des coûts est vérifiée, c’est-à-dire si tij = tji, impliquant que ∏i = Pi, l’équation de gravité peut se réécrire comme suit :
Pi et Pj , les indices de prix des pays i et j, sont des indicateurs de résistance multilatérale, c’est-à-dire les coûts moyens liés au commerce entre un pays et tous ses partenaires. Intuitivement, le modèle de gravité explique l’intensité des flux commerciaux bilatéraux des pays par leurs masses respectives (les PIB) et par la distance qui les sépare. Ainsi, la transposition économétrique originelle simplifiée du modèle de gravité inspirée de Tinbergen (1962) prend la forme suivante :
Comij représente le commerce total bilatéral entre les pays i et j, Yi et Yj les PIB respectifs des pays et Dij la distance qui les sépare. Les βi sont des paramètres à estimer et εij est un facteur de nuisance.
La forme précédente du modèle de gravité n’a jamais été appliquée en l’état. Selon les auteurs et en fonction des objectifs poursuivis et des sensibilités théoriques, certaines variables sont généralement ajoutées. Elles sont quantitatives (populations, surfaces arables, PIB par tête, etc.) et/ou qualitatives (liens sociologiques et historiques, position géographique, variables d’intégration, etc.). Ainsi, en suivant Rose (2000), la spécification de la forme log-linéaire augmentée de certaines variables adoptée dans le cadre de cet article est la suivante :
avec Comijt la valeur du commerce bilatéral entre le pays i et le pays j à la période t, Yi(j)t les PIB réels desdits pays, Popi(j)t les populations respectives, Pi(j)t les indices de prix à la consommation, Infli(j)t les taux d’inflation, DDi(j)t les indicateurs des droits de douane, et Dij la distance qui sépare les deux pays. CFAij est une variable indicatrice qui prend la valeur 1 si les pays partagent une même monnaie (ici le franc de la Coopération financière d’Afrique centrale). Ouvi est une variable qui prend en compte l’ouverture du pays exportateur à la mer. LCij, FCij et CCij sont des variables muettes qui valent 1 si les pays i et j partagent une langue commune, une frontière terrestre commune et un colonisateur commun respectivement. UEj, BRICSj, CEDEAOj et CEEACj sont des variables d’intégration qui captent la création ou le détournement de commerce. Ces variables prennent la valeur 1 si le pays j, c’est-à-dire le pays de destination appartient à l’une ou l’autre communauté indiquée par la variable hyponyme, et 0 sinon. Enfin, εijt est une perturbation aléatoire. Pour une meilleure compréhension, il convient de justifier le choix de certaines variables.
Les indices de prix (base 100 en 2005) captent les résistances multilatérales absolues. Toutefois, nous avons jugé nécessaire de capter alternativement de manière relative les résistances multilatérales à l’aide des taux d’inflation. Cette approche, non encore rencontrée dans les travaux existants, nous semble très novatrice à la limite de nos connaissances. En effet, un taux d’inflation élevé (lorsque l’inflation n’est pas importée, mais causée par les coûts salariaux ou la monnaie) dans le pays i augmente la préférence des consommateurs domestiques pour les produits étrangers. En revanche, l’inflation dans le pays j décourage les partenaires de ce pays, qui redoutent les effets négatifs de ce choc sur la consommation locale.
Les variables DDit et DDjt n’auraient aucune pertinence (du moins sur le plan théorique) dans le contexte de la CEMAC, qui forme une union douanière. Mais dans la réalité, tel n’est pas le cas. Toutefois, leur prise en compte pourrait se justifier par le fait que dans la réalité, les pays de la CEMAC n’appliquent pas les principes de l’union douanière, et que, même s’ils les appliquaient, l’échantillon est composé d’autres pays qui ne sont pas membres de la CEMAC.
La distance est l’une des variables difficiles à modéliser. Intuitivement, elle peut être appréhendée comme une estimation des coûts de transport. Ainsi, plus elle est élevée, plus les coûts de transport sont élevés, moins les pays commercent entre eux. La distance intègre en général les coûts de transaction et d’information. Elle peut aussi expliquer les différences structurelles entre deux pays, y compris les différences culturelles, sociologiques et de langue. Mais la question fondamentale que pose la variable « distance » est celle de sa mesure. Dans la littérature empirique, trois types[8] de mesures sont habituellement retenues (Luo, 2001). Dans le cadre de cet article, nous retenons la distance à vol d’oiseau ou encore distance orthodromique, en raison de la disponibilité des données. Elle considère les capitales des pays comme les pôles commerciaux et calcule la distance d’arc entre ces pôles à l’aide des coordonnées géographiques (longitude et latitude). Cette mesure de la distance donne des résultats robustes seulement sous la condition du « ceteris paribus ».
L’une des limites du modèle de gravité ainsi présenté est qu’il ne capte pas les effets spécifiques. Or, comme l’a souligné Feenstra (2004), l’ajout d’un effet spécifique pays au modèle de gravité est en parfaite adéquation avec le cadre théorique et permet d’avoir un estimateur robuste pour la variable d’intérêt. Cet effet spécifique regroupe tous les autres facteurs invariants mais qui affectent le volume de commerce. Ainsi par exemple, lorsque les exportations d’un pays augmentent plus rapidement que son PIB, cette particularité pourrait s’interpréter comme un effet spécifique à ce pays et non comme un effet bilatéral. Prolongeant cette analyse, Cheng et Wall (2005) ont montré que les effets bilatéraux sont préférables aux effets individuels. C’est cette dernière proposition qui est retenue. Ainsi, en intégrant les effets bilatéraux (µij) et temporels (λt) et en regroupant les variables par nature, on obtient le modèle compact à erreur composée à deux facteurs suivant :
Qijt est le vecteur des variables quantitatives et Dumij le vecteur des variables qualitatives.
2.3 La méthodologie de calcul du potentiel commercial
Le calcul du potentiel commercial dépend des résultats du modèle de gravité. Le modèle de gravité ayant servi à estimer les déterminants des échanges dans la CEMAC a inclus certains pays hors CEMAC. Cela ne biaise pas l’analyse, d’autant plus que l’effet CEMAC a été capté par la variable « CFA ». Trois approches sont identifiées pour mesurer le potentiel commercial.
La première approche, la plus simple, consiste à générer le résidu de l’estimation et à constater sa déviation par rapport à zéro. Ainsi, si le résidu est positif, la valeur effective est supérieure à la valeur potentielle. S’il est en revanche négatif, la valeur potentielle est supérieure à la valeur effective. S’il est nul, la variable se situe à son niveau simulé.
La deuxième consiste à calculer le potentiel commercial à partir d’un ratio entre le commerce prédit et le commerce observé. Toutefois, cette méthode montre que le potentiel commercial est biaisé. Ce biais se justifie par le fait que le modèle simulé est fondé sur un échantillon plus large, c’est-à-dire qu’il contient d’autres pays pour lesquels le potentiel commercial ne sera pas calculé. Ainsi, en calculant le potentiel sans corriger cet aspect, les résultats pourraient être contradictoires, c’est-à-dire surestimés ou sous-estimés. Ce biais est d’autant plus important que l’investissement n’est pas pris en compte comme variable explicative (Fontagné et al., 2002). Un autre argument avancé est celui de l’hétérogénéité de l’échantillon. En effet, notre échantillon est constitué des pays de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), des pays de la CEDEAO, des pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), des pays de l’UE, des États-Unis, du Royaume-Uni et de certains pays africains (Maroc, Égypte, Tunisie, Algérie, Kenya). À ce titre, selon la théorie des cônes de diversification, les dotations factorielles des pays pris dans deux sous-régions distinctes seraient très différentes, mais relativement similaires dans une même sous-région. Dans ce cas, les rémunérations des facteurs pourraient afficher des différences significatives, ce qui induirait des écarts tout aussi significatifs en termes de revenus ou de revenus par tête. Un dernier problème évoqué est celui de la parité des pouvoirs d’achat. Les PIB des pays de l’échantillon sont tous estimés en dollars, ce qui suggère qu’un certain taux de change est utilisé. En effet, connaissant les disparités des niveaux de vie des pays de l’échantillon, normaliser leur PIB en fonction d’un taux de change uniquement issu des valeurs de leurs différentes monnaies par rapport au dollar pourrait biaiser les résultats de l’estimation.
Pour corriger ces différents biais, une troisième approche empruntée à Fontagné et al. (2002) est adoptée. Elle procède en deux étapes. La première étape consiste à ajuster les flux commerciaux simulés comme suit :
ij représente les flux commerciaux bilatéraux simulés bruts, c’est-à-dire ceux qui sont directement obtenus de l’estimation du modèle, Comij le niveau de commerce bilatéral observé et Com*ij les flux commerciaux simulés ajustés.
La deuxième étape consiste à calculer le potentiel commercial (PC) pour une période donnée comme une moyenne arithmétique des flux simulés bruts et des flux simulés ajustés :
3. Estimation et analyse des résultats
La présentation et l’analyse des résultats sont précédées par celles des données de l’échantillon et de la méthode retenue pour l’estimation.
3.1 Présentation des données et de l’échantillon
Les données utilisées dans cet article sont généralement issues des bases d’organismes ou de centres de recherche internationaux. Les informations relatives aux variables expliquées (importations bilatérales, exportations bilatérales) ont été extraites de la CNUCED. Le commerce bilatéral total a été calculé par les auteurs comme une simple somme de ses deux composantes. Les variables traditionnelles telles que les PIB et les populations, de même que les variables de résistance multilatérale (prix, inflation, droits de douane) ont été fournies par la Banque mondiale. Les données relatives à la distance ont été extraites des fichiers du Centre d’études prospectives et d’information internationales (CEPII), organe qui fournit la plupart des données relatives aux variables utilisées pour estimer le modèle de gravité. La variable monnaie unique de même que les autres variables muettes de contrôle et d’intégration ont été construites par les auteurs. Les supports utilisés sont la mappemonde et certains dictionnaires interactifs tels que Google Earth et Encarta. La période d’étude va de 1995 à 2010. Elle est conditionnée par la disponibilité des données de la variable dépendante.
Le modèle de gravité est estimé à partir d’un échantillon de 55 pays du monde, à savoir les pays de la CEMAC (plus les autres pays membres de la CEEAC), les pays de la CEDEAO, les pays de l’UE, les BRICS, les États-Unis, le Royaume-Uni et certains pays africains (voir la liste en annexe). La prise en compte de ces régions permettra de cerner les effets spécifiques en matière de destruction ou de création d’échanges du commerce de la CEMAC avec ces dernières. Toutefois, seul le commerce bilatéral des pays de la CEMAC avec le reste des pays est considéré comme variable dépendante. Cette spécification donne un nombre total de 5 184 observations, soit 6 pays, 54 flux commerciaux bilatéraux par pays et 16 périodes.
3.2 La méthode d’estimation du modèle de gravité
Les équations gravitationnelles sont généralement estimées en coupe transversale (N pays, N partenaires, à une date donnée). Il n’est cependant pas rare que l’ensemble de l’information temporelle soit utilisé dans une même estimation. Les données pour chaque couple de pays et chaque année sont alors simplement empilées et l’équation est estimée par la méthode des moindres carrés ordinaires. Spécifiée en panels, la modélisation est déterminée par la nature de l’aléa, qui peut être un terme constant au cours du temps ne dépendant que de l’individu, un terme ne dépendant que de la période ou un terme croisé. Ainsi, les techniques d’estimation dépendent des hypothèses retenues sur les composantes de cet aléa.
Tout d’abord, une méthode simple peut être utilisée en appliquant directement les moindres carrés ordinaires sur données empilées (modèle à effets communs), sans se préoccuper de la composition de l’aléa. Ensuite, le modèle à effets individuels (ou temporels) fixes peut être estimé si l’on suppose que les composantes individuelles (ou temporelles) de la perturbation sont des effets constants et non aléatoires, qui viennent simplement modifier la valeur de l’ordonnée de l’équation. Si on suppose en outre que les perturbations aléatoires croisées satisfont aux hypothèses des moindres carrés ordinaires (MCO) (centrées, homoscédastiques, indépendantes et normales), les estimations sont optimales. Enfin, il peut être fait recours au modèle à effets aléatoires, qui suppose que les composantes du résidu sont aléatoires.
L’estimateur des variables instrumentales de Hausman Taylor (1981) est généralement utilisé pour tenir compte de l’endogénéité et de la constance de certaines variables modélisées dans l’équation de gravité. Cependant, cet estimateur pose plusieurs problèmes, notamment ceux du choix, du nombre et de la validité des instruments. Les deux premiers gardent un caractère arbitraire, car ils ne reposent sur aucun fondement théorique. Le troisième est celui de la définition de l’endogénéité, qui peut être analysée suivant trois variantes : les biais de simultanéité, des erreurs de mesure et des variables omises (Lochard, 2005). Bien plus, la méthode de Hausman-Taylor ne distingue pas entre les trois et à tendance à les traiter de la même manière. Ainsi, si l’estimateur Hausman-Taylor corrige certainement le biais lié à la constance de certaines variables, il n’en demeure pas moins que l’usage des MCO donne également des coefficients robustes, notamment lorsque la variable dépendante contient une faible proportion de zéros[9] (Fontagné et al., 2002). En outre, l’application des MCO semble donner une bonne estimation du potentiel commercial, objectif principal dans cet article. C’est pour ces différentes raisons et suivant Fontagné et al., que nous privilégions cette dernière méthode.
3.3 Résultats et interprétations
3.3.1 Les résultats du modèle de gravité
Trois variantes de modèles sont estimées, les variables dépendantes étant successivement les importations, les exportations et le commerce total. L’estimation du premier modèle (tableau 2) permet d’identifier quatre blocs de variables : le bloc des variables traditionnelles (PIB, POP, Dist), le bloc des variables de résistance multilatérale (p, Infl), le bloc des variables muettes de contrôle (CFA, OUV, LC, FC) et le bloc des variables muettes d’intégration (UE, BRICS, CEDEAO, CEEAC).
En ce qui concerne le bloc des variables traditionnelles, les résultats présentent les signes attendus conformément à la théorie. Ainsi, quelle que soit la variable dépendante considérée, le PIB du pays i contribue positivement et significativement à 1 % à son commerce bilatéral. En effet, l’augmentation du revenu induit un pouvoir d’achat supplémentaire. Ce pouvoir d’achat supplémentaire encourage les importations, accroît les moyens de production avec un effet multiplicateur sur la production et le volume des exportations et, par conséquent, sur le commerce total du pays. Une analyse similaire peut être menée pour le pays j. Les populations ont également tendance à augmenter significativement le commerce bilatéral des pays. En effet, lorsqu’il s’agit des importations, la population du pays i, lorsqu’elle augmente, agit comme un indicateur de taille de marché pouvant absorber les produits importés. En prenant le cas des exportations, un signe positif se justifie également et explicite le fait que la population du pays i constitue une approximation de la force de travail et agit comme un déterminant fondamental de la production et donc de l’exportation dudit pays. En ce qui concerne la population du pays j, elle est un vecteur significatif d’intégration commerciale que ce soit en termes d’importations, d’exportations ou de commerce total. Enfin, la distance joue son rôle de pesanteur pour le commerce bilatéral, même si le signe ne devient significatif que dans le cas du commerce total. Ce résultat implique que toutes choses égales par ailleurs, l’augmentation de la distance d’une unité entre deux pays réduit leur commerce total bilatéral de 0,35 unité. Ces résultats sont en cohérence avec ceux obtenus dans certains travaux précédents (Avom, 2005; Gbetnkom et Avom, 2005; Gbetnkom, 2006; Agbodji, 2007; Mignamissi, 2008).
Quant aux variables de résistance multilatérale, les résultats sont contrastés. Lorsque nous considérons les niveaux de prix, les signes sont positifs et globalement significatifs à 1 %. L’augmentation des prix dans le pays i explique positivement et significativement ses exportations et son commerce total. En effet, un niveau général des prix qui augmente constitue une capture de rente pour le pays exportateur, notamment lorsque ses produits continuent d’être demandés. C’est donc l’élasticité de la demande étrangère face aux prix domestiques qui tend à expliquer ce phénomène. En revanche, si les prix dans le pays j augmentent avec les exportations du pays i, cela voudrait dire que le premier subit peut-être un dumping. À cet effet, les produits étrangers entrent à moindre coût et capturent la demande dans le pays j déjà en situation d’inflation. En analysant les niveaux d’inflation, il ressort que l’augmentation de l’inflation dans le pays i dégrade son commerce bilatéral, alors que pour le pays j, c’est l’effet contraire. De toute évidence, l’inflation dans le pays i diminue ses échanges à cause du fait qu’elle pourrait être importée par ses partenaires. En ce qui concerne les importations, l’augmentation des prix dans le pays i influence les coûts de transaction que pourront désormais supporter ses partenaires importateurs. Relativement aux exportations, une inflation galopante dans le pays i décourage les opérateurs économiques des pays partenaires, qui craignent d’importer ce choc négatif dans leurs économies. Il va s’opérer dans les pays partenaires un effet de substitution des biens importés par les biens domestiques, même si ces derniers sont de qualité inférieure. En effet, l’inflation étrangère grève le pouvoir d’achat domestique face aux biens étrangers. Le fait que le commerce dans le pays j augmente avec son inflation pourrait s’expliquer par le fait que ses partenaires, malgré les coûts de transaction qui seraient théoriquement élevés dans ce pays, parviennent à augmenter leurs marges commerciales. C’est donc l’arbitrage entre l’augmentation des marges et le niveau des coûts de transaction dans le pays j qui justifierait ce signe.
Les variables muettes de contrôle donnent des coefficients attendus et significatifs, sauf pour la variable de langue commune qui a tendance à dégrader significativement le commerce bilatéral dans la CEMAC. Cette particularité pourrait s’expliquer par le fait que les pays de la CEMAC parlent plusieurs langues (le français, l’anglais, l’espagnol et l’arabe), y compris les langues nationales. Si on ajoute à cette pluralité de langues celles des autres partenaires au commerce, cette variable ne peut que détériorer le commerce bilatéral.
Les variables d’intégration sous-régionale montrent que seul le partenariat avec l’UE engendre une création significative de commerce, les autres induisant une destruction également significative de commerce. Ce résultat implique que pour tout pays membre de la CEMAC, le fait que son partenaire au commerce appartienne à l’UE accroît la valeur de ses importations de 0,6 et ses exportations de 0,7. La destruction d’échanges la plus sévère est observée lorsque le pays partenaire est membre de la CEEAC. Ainsi, l’appartenance à cette sous-région altère les importations des pays membres de la CEMAC de 0,83, leurs exportations de 0,11 et leur commerce total de 0,88. Cette remarque implique que le fait pour les pays d’Afrique centrale de partager les mêmes dotations factorielles constitue un obstacle à leur commerce intracommunautaire. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus par Avom (2005), Mignamissi (2008), Carmignami (2010) et Carrère (2013).
Le modèle ainsi estimé est globalement acceptable, la statistique de Fisher étant significative au seuil de 1 %. L’ajustement est tout aussi appréciable pour une modélisation en panel, avec des R2 supérieurs à 0,50 pour toutes les variantes[10]. Toutefois, le modèle tel que spécifié souffre d’une autre limite, à savoir la non-prise en compte des coûts directement liés au commerce, par exemple les droits de douane. Les facteurs de résistance multilatérale (niveau et variation des prix) ne donnent qu’une approximation des coûts de transaction du commerce. Ainsi, la prise en compte des droits de douane apporte des modifications importantes dans le modèle, sauf sur les signes des variables traditionnelles.
En revanche, le coefficient associé à la langue commune devient positif mais non significatif. De même, les coefficients des variables de création/détournement de commerce se trouvent modifiés. Ainsi, les partenariats avec l’UE et la CEEAC ont un impact négatif relativement aux importations et au commerce total. Ce résultat traduit le fait qu’un partenariat avec ces sous-régions non basé sur l’annulation ou la minimisation des droits de douane n’est pas optimal pour les pays de la CEMAC. Dans cette optique, la mise en place des principes de « réciprocité » ou de la « clause de la nation la plus favorisée » tels qu’édictés par l’OMC n’est pas favorable aux pays de la sous-région. Bien plus, le faible état d’intégration commerciale dans la CEMAC expliquerait aussi ce signe. En revanche, lorsque le pays j est de la CEDEAO, le commerce des pays de la CEMAC augmente significativement (à 1 %), avec un coefficient de l’ordre de 0,58 à 0,62. Enfin lorsqu’il s’agit des BRICS, les exportations diminuent, impliquant le fait que les pays de la CEMAC sont des importateurs nets face à ce groupe. Cependant, les BRICS importent davantage les produits venant de l’Occident au détriment des pays de la CEMAC, ce qui a tendance à réduire relativement les exportations de ces derniers vers les BRICS (les résultats sont disponibles à la demande).
Mais avant de passer au calcul du potentiel commercial, il semble important d’apprécier comment les différentes variables explicatives influencent le gap commercial, calculé comme la différence entre le niveau observé et le niveau simulé du commerce. Cette approche consiste à régresser le gap commercial sur les variables identifiées dans l’étude, afin de voir lesquelles creusent ou comblent ce gap. Les résultats de cette approche sont reportés dans le tableau 3.
Les variables traditionnelles semblent expliquer le gap commercial dans la CEMAC comme attendu. Toutes choses égales par ailleurs, si le PIB ou la population de l’un des pays augmente alors que celui ou celle de l’autre reste stable, cette augmentation creuse le gap. En effet, le PIB d’un pays qui augmente implique une augmentation de son pouvoir d’achat et donc de son commerce effectif. Si en même temps le commerce estimé reste au même niveau à cause de l’effet des autres variables, par exemple, cette situation induit une augmentation du gap commercial. Toutefois, ce gap peut être positif ou négatif. Le gap ayant été calculé en valeur absolue, cette évolution traduit le fait qu’une baisse du PIB peut entraîner un gap négatif alors qu’une hausse du PIB cause un gap positif. La distance quant à elle influence négativement le gap commercial. En ce qui concerne les variables de résistance multilatérale, elles expliquent négativement le gap pour le pays i et positivement pour le pays j. Toutes choses égales par ailleurs, une augmentation du niveau des prix de manière absolue ou relative dans le pays i a tendance à diminuer le gap commercial alors que l’effet est inverse dans le pays j. Les variables muettes de contrôle quant à elles expliquent de manière globale positivement et significativement à 1 % le gap commercial. Enfin, parmi les variables muettes d’intégration, seul l’UE a tendance à expliquer positivement le gap commercial, c’est-à-dire à le creuser. Ce résultat pourrait s’expliquer par le fait que le commerce entre les pays de la CEMAC et ceux de l’UE est inégal, car l’inégalité dans le commerce augmente comparativement aux autres regroupements.
Le principal apport de cette dernière approche est de permettre aux gouvernements de la Communauté de percevoir comment le différentiel de commerce peut être progressivement annulé en agissant sur certaines variables économiques.
3.3.2 Les résultats du potentiel commercial
Pour calculer le potentiel commercial, la méthode des effets communs est utilisée, car elle donne la plus grande valeur au commerce simulé. Les variables associées aux droits de douane ont été exclues à cause de l’inexistence de séries longues pour tous les pays. Le tableau 4 donne la synthèse du potentiel commercial dans la CEMAC[11].
Bien que faibles, les résultats semblent appréciables étant donné les attentes. Par rapport au commerce total, c’est le Cameroun qui dégage le potentiel le plus élevé, en dehors de ses flux bilatéraux avec la Guinée équatoriale. Quant aux autres pays, ils n’observent de potentiel élevé que dans leurs flux bilatéraux avec le Cameroun. Cette caractéristique fait du Cameroun le moteur du commerce intra-CEMAC et donc de l’intégration de cette sous-région.
Lorsqu’on considère les exportations, c’est toujours le Cameroun qui affiche les potentiels les plus élevés. Ses partenaires font observer quant à eux un faible potentiel de manière générale. Ce résultat implique que le Cameroun est le seul pays de la Communauté qui exporte vers les autres pays. En revanche, lorsqu’il s’agit des importations, la distribution du potentiel semble uniformément répartie. Cette tendance stipule qu’il y a, relativement aux exportations, réciprocité des importations dans la CEMAC.
Le niveau de potentiel commercial pourrait s’expliquer par le fait qu’à l’échelle de la sous-région, il y a des pays relativement diversifiés (le Cameroun), par rapport aux autres. Un autre argument est la taille (en termes de population notamment) des pays. D’autres études mettent en exergue le rôle de la superficie ou de la surface arable (Mignamissi, 2008).
Cette analyse est bouclée par la description du potentiel de création ou de destruction d’échanges dans la CEMAC. Cet indicateur est calculé comme la différence entre le commerce observé et le potentiel commercial. S’il est positif (négatif), on assiste à une création (destruction) d’échanges, c’est-à-dire que les pays échangent au-delà (en deçà) de leur niveau de pleine utilisation des capacités commerciales. Le graphique 6 donne une représentation de cet indicateur.
De manière spécifique, les épisodes de création d’échanges ont tendance à dominer ceux de destruction d’échanges. Les épisodes importants de création d’échanges concernent les flux bilatéraux Cameroun-Gabon, Cameroun-Guinée équatoriale, Guinée équatoriale-Cameroun, et Tchad-Cameroun. Quant aux épisodes de destruction, ils impliquent, avec une ampleur moindre les flux Cameroun-RCA, Cameroun-Tchad et Congo-Cameroun.
Ce résultat confirme notre intuition selon laquelle les pays de la CEMAC et notamment le Cameroun commercent globalement au-delà de leur potentiel, ce qui décrit un effort significatif en la matière. Au total, l’implication du Cameroun à la destruction d’échanges dans la CEMAC montre la tendance à l’orientation commerciale de ce pays vers les pays hors zone, mais bien plus par le fait qu’il ait largement épuisé son potentiel commercial vis-à-vis de ses partenaires. Toutefois, ces derniers possèdent encore, comme le montre le graphique 6 un potentiel d’échanges, quoique faible.
Conclusion
L’intégration par le marché est sans doute une étape fondamentale dans le processus d’intégration économique d’une communauté régionale. Mais le cas de la CEMAC semble atypique en particulier parce que les faits stylisés et même les études empiriques montrent que le commerce intrazone reste faible par rapport au commerce total malgré les avantages de l’existence d’une monnaie unique. Dans l’optique de tester ce résultat avec des données récentes, le présent article s’est fixé pour objectif l’évaluation du potentiel commercial de la CEMAC. Pour cela, après une analyse des faits stylisés et l’estimation des déterminants des échanges bilatéraux à l’aide d’une équation de gravité dans sa version augmentée, un indicateur de potentiel commercial a été calculé.
Les faits stylisés nous enseignent que : (i) le commerce de la CEMAC s’accélère plus avec ses partenaires stratégiques (UE, Chine) qu’avec elle-même; (ii) la CEMAC se présente comme l’un de ses derniers partenaires au commerce loin derrière l’UE, l’ALENA et même la CEDEAO, s’affichant de ce fait comme la communauté la moins intégrée d’Afrique; (iii) il existe de fortes disparités quant aux tendances dynamiques du commerce de la CEMAC.
L’estimation du modèle de gravité dans les différentes variantes et spécifications montre, en accord avec la théorie économique et les résultats des travaux existants, que les coefficients associés aux variables traditionnelles et aux variables muettes de contrôle sont globalement de signes attendus. Toutefois, quelques spécificités existent et pourraient s’expliquer par la nature des données et de l’échantillon. En ce qui concerne le potentiel commercial, les résultats montrent un faible niveau de cet indicateur. Cette situation pourrait traduire un effort de commerce, car les pays commercent, à part le Cameroun, en deçà de leur niveau potentiel. Mais, le faible effort commercial observé serait causé par une faiblesse du revenu par habitant et une structure productive peu diversifiée. Enfin, les résultats révèlent la prédominance des épisodes de création d’échanges par rapport à ceux de destruction, cette destruction étant expliquée par le poids du Cameroun dans la sous-région.
Pour ce faire, dans la perspective de la recherche des solutions, il convient de renforcer la politique commerciale de la Communauté. Il peut s’agir précisément d’une réorganisation des structures de production des pays, pouvant aboutir à une diversification sous-régionale, l’objectif étant de renforcer la complémentarité commerciale à travers l’expression des demandes croisées. Il peut aussi s’agir pour les pays de la sous-région de développer, malgré une forte concurrence internationale, les avantages comparatifs non fondés sur les dotations naturelles. Il faut noter en plus le respect de la discipline financière, facteur pouvant faciliter le financement des projets intégrateurs et renforcer le capital infrastructurel d’intégration. Enfin, il conviendrait de penser à augmenter la taille de la zone à l’aide du processus de rationalisation, notamment à la suite du nouveau souffle apporté par l’Union africaine à travers la relance de la CEEAC, espace choisi comme pôle d’intégration en Afrique centrale. Ces conditions constitueraient sans doute des prémisses pour le déclenchement d’une véritable dynamique d’intégration sous-régionale permettant à l’Afrique centrale de devenir un espace de croissance tirée par les moteurs de l’intégration.
Appendices
Annexe
Liste des pays de l’échantillon
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier le rapporteur anonyme de la revue pour ses remarques et suggestions qui ont permis d’améliorer considérablement les versions antérieures de cet article. Toutefois, ils restent selon la formule consacrée, responsables des erreurs et omissions qui pourraient encore subsister dans le texte. Les opinions émises dans cet article sont strictement celles des auteurs et n’engagent nullement l’Université Yaoundé II-Soa, leur institution de rattachement.
Notes
-
[1]
Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale, créée en 1994 en remplacement de l’Union douanière des États de l’Afrique centrale (UDEAC). Elle comporte six États membres : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République centrafricaine et le Tchad.
-
[2]
En termes d’extraversion en faveur de l’Europe par exemple, les flux du Cameroun vers cette région ont connu une très forte accélération, passant de 3,7 % en 2003-2004 à 24,07 % en 2004-2005. Sur la même période, les exportations du Cameroun vers ses partenaires de la CEMAC diminuent en proportion de ses exportations totales : 8,47 % en 2003, 6,57 % en 2004 et 4,63 % en 2005. À titre comparatif, cette part est respectivement de 63,70 %, 69,27 % et 71,57 % pour l’Europe (données extraites des bases du ministère du Commerce du Cameroun).
-
[3]
Un indice a été développé par Herfindahl-Hirschmann. Il est normalisé afin d’obtenir des valeurs comprises entre 0 (concentration nulle) et 1 (concentration maximale). Si l’indice est proche de 0, les exportations sont moins concentrées, c’est-à-dire que le pays exporte une panoplie de produits. S’il est proche de 1, l’exportation concerne peu de produits.
-
[4]
L’Union économique et monétaire ouest-africaine est composée du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte-d’Ivoire, de la Guinée-Bissau, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo.
-
[5]
Par l’intermédiaire de comptes d’opérations ouverts par le Trésor français aux trois banques centrales de la Zone franc.
-
[6]
Pour certains pays africains, le commerce avec la Chine est dominant : par exemple, le Soudan, l’Angola et la République démocratique du Congo exportent vers la Chine respectivement 61 %, 52 % et 48 % de leurs exportations totales; le Lesotho et le Libéria importent de la Chine 47 % et 42 % de leurs importations totales. Les exportations de la Chine vers l’Afrique sont dominées par les biens manufacturés (95 % de ses exportations en 2010); il s’agit principalement de machines et d’équipements de transport (43 % en 2010), puis de textiles et de vêtements (17 % en 2010). Quant aux importations de la Chine, elles sont dominées par les produits primaires (90 % des importations en 2010 dont 59 % de pétrole et 26 % de minerais). La structure du commerce entre la Chine et l’Afrique reflète ainsi le modèle traditionnel des avantages comparatifs.
-
[7]
Cette équation se note comme suit : . F est la est la force d’attraction, Mi(j) la masse du corps i(j), g la constante de gravitation et Dij la distance qui sépare les deux corps.
-
[8]
Les deux autres formes sont la distance réelle et la distance réelle ajustée. La distance réelle prend deux formes, à savoir la distance réelle terrestre et la distance réelle maritime. La première forme est généralement mesurée comme la moyenne de la distance routière et de la distance ferroviaire. Quant à la seconde, elle est mesurée par la longueur réelle de la route maritime entre les deux ports des deux pays. La distance réelle ajustée quant à elle implique qu’à distance réelle égale, la qualité des infrastructures influence significativement le coût de transport. Plus les infrastructures sont de meilleure qualité, moins sera le coût de transport. Cette mesure soulève tout de même une critique sévère selon laquelle il n’existe pas une mesure unanime des infrastructures corrélativement au transport.
-
[9]
La proportion de zéros dans la variable dépendante dans cet article est de 18,42 %.
-
[10]
En utilisant les méthodes des effets fixes et des effets aléatoires, l’estimation confirme la présence d’effets spécifiques bilatéraux, et le test de Hausman tranche en faveur du modèle à effets fixes. Ce dernier résultat implique que les composantes individuelles du terme d’erreur sont constantes, c’est-à-dire qu’elles viennent simplement modifier la valeur de l’ordonnée à l’origine ou de la constante. Ceci traduit que l’impact des variables non spécifiées dans la modélisation est beaucoup plus invariant relativement aux paires des pays. À cet effet, l’on ne doit pas s’attendre à une modification du commerce bilatéral dans la CEMAC si au préalable des réformes institutionnelles et structurelles profondes ne sont pas mises en oeuvre
-
[11]
Les matrices entières sont disponibles sur demande.
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