Volume 82, Number 1-2, mars–juin 2006 Les modèles non unitaires de comportement des ménages : théories et applications Guest-edited by Olivier Donni
Table of contents (10 articles)
Articles
-
Les modèles non unitaires de comportement du ménage : un survol de la littérature
Pierre-André Chiappori and Olivier Donni
pp. 9–52
AbstractFR:
Cet article s’intéresse aux modèles non unitaires de comportement du ménage. Ces modèles supposent explicitement que le ménage est composé de plusieurs personnes ayant des préférences distinctes. Ils se classent alors en deux catégories principales : d’une part, les modèles coopératifs (ou collectifs), dans lesquels les allocations sont supposées efficaces au sens de Pareto, et d’autre part, les modèles non coopératifs (ou stratégiques) qui s’appuient sur la notion d’équilibre de Cournot-Nash. Dans ces modèles, les fonctions qui caractérisent le comportement du ménage doivent satisfaire des contraintes différentes des traditionnelles conditions de Slutsky. De plus, dans certains cas particuliers, les préférences des membres du ménage peuvent être identifiées à partir du comportement observable.
EN:
This paper examines the literature on non-unitary models of household behaviour. These models explicitly postulate that the household is made up of several persons with different preferences. They can be classified into two categories. On the one hand, cooperative (or collective) models suppose that the outcome of the decision process is Pareto efficient. On the other hand, non-cooperative (or strategic) models are based on the concept of Cournot-Nash equilibrium and, in that case, the outcome of the decision process is not necessarily efficient. Demand functions or labour supply functions derived from non-unitary models have to satisfy some restrictions that are different from Slutsky conditions. Moreover, in some circumstances, preferences of household members can be identified from observable behaviour.
-
Un modèle non coopératif de consommation des ménages
David Ulph
pp. 53–85
AbstractFR:
Cet article construit un modèle de consommation du ménage fondé sur un équilibre non coopératif de Nash. Ce modèle est extrêmement général, tant du point de vue des types de biens et de revenus considérés que de la nature des fonctions d’utilité individuelles. Les conditions d’unicité d’un tel équilibre sont déduites; on montre que, malgré la généralité de sa structure sous-jacente, des contraintes fortes sont placées sur les demandes de biens issues des modèles respectant ces conditions d’unicité. Les propriétés générales de statique comparée des demandes de biens du ménage sont dérivées.
EN:
The paper constructs a non-cooperative Nash model of household consumption behaviour which is extremely general in both the pattern of intra-household flows for commodities and income that are permitted, and in the nature of the individual utility functions that are employed. Conditions are derived for the uniqueness of such equilibria, and it is shown that, despite the generality of the underlying structure, some striking restrictions can be placed on household commodity demands arising from models satisfying these conditions. The general comparative static properties of household commodity demands are derived.
-
Choix de consommation des ménages en présence de plusieurs décideurs
Anyck Dauphin, Abdel-Rahmen El Lahga, Bernard Fortin and Guy Lacroix
pp. 87–118
AbstractFR:
Récemment, un nouveau cadre théorique d’analyse s’est développé dans le but d’analyser les comportements des ménages avec deux conjoints. Cette approche, qualifiée de modèle collectif, suppose que chaque conjoint a des préférences individuelles et que les choix du ménage sont Pareto-optimaux. Toutefois, les études empiriques réalisées jusqu’à maintenant sur les modèles collectifs ont porté essentiellement sur des ménages à deux décideurs et ignorent le comportement des ménages qui en comptent potentiellement un plus grand nombre (p. ex., couples vivant avec des enfants adultes ou avec des personnes âgées dans les pays développés, familles élargies dans les pays en développement). Le but de cet article est double : dans un premier temps, nous présentons de façon synthétique les principaux tests qui ont été proposés pour vérifier empiriquement les contraintes du modèle collectif dans un tel contexte. Nous proposons également un test qui s’avère être équivalent à un autre test présenté dans la littérature mais qui dans certains cas s’avère plus facile à mettre en oeuvre. Dans un deuxième temps, nous testons le modèle collectif à plusieurs décideurs à l’aide d’une enquête sur des microdonnées britanniques. L’échantillon retenu comprend des couples avec un enfant de 16 ans et plus. Les résultats rejettent le modèle collectif avec un ou deux décideurs mais ne le rejettent pas dans le cas de trois décideurs.
EN:
Recently, a new theoretical framework has been proposed to analyze the behavior of households composed of two adults. This approach, usually referred to has the “collective model”, assumes that spouses have distinct preferences and that household decisions are Pareto efficient. So far, most empirical studies based on the collective approach have focused on households made up of two decision makers thus ignoring households in which there may be more (e.g., couples with adult children or parents in developed countries, extended families in developing countries). The purpose of this paper is twofold: first we summarize the main tests that have been proposed to empirically verify the constraints that derive from the collective setting. We also present a new test that is equivalent to an existing test but that is easier to implement in certain circumstances. Second, we test the multiple-person collective model using British survey data. The sample comprises couples with a single child aged 16 or older. Our results reject the collective model with one or two decision-makers, but do not reject it when three decisions-makers are assumed.
-
Discrimination sexuelle dans les dépenses des ménages : survol de la littérature et évidences empiriques pour le Canada
Pierre Lefebvre
pp. 119–153
AbstractFR:
La recherche récente suggère que le sexe d’un enfant a des effets importants et étendus sur les comportements parentaux et les résultats familiaux. Un constat général émerge de cette littérature : en matière de choix de vie familiale (mariage, divorce, fécondité) et de comportements individuels (de travail, de consommation, d’activités non marchandes) il y a des différences notables entre les hommes et les femmes. Les constats empiriques sont cohérents avec les modèles économiques qui expliquent les comportements intrafamiliaux comme le résultat d’un processus complexe de négociations concernant l’allocation du temps et des ressources familiales, et le partage du « surplus » familial et conjugal (dégagé par rapport au fait de vivre seul). Cette recherche aborde la question en examinant le panier des dépenses de consommation des familles qui ont un ou deux enfants du même sexe. L’analyse empirique cherche à identifier s’il y a un effet de « genre » dans les dépenses familiales en estimant l’effet du sexe de l’enfant sur plusieurs catégories de dépenses dont des biens familiaux à caractère public tels que l’habitation et les biens durables. D’autres types de dépenses sont aussi analysés (alimentation, soins médicaux, loisir et divertissement, aliments achetés au restaurant, services personnels, soins de santé et médicaments, dons et contributions). L’analyse utilise les microdonnées des fichiers publics de l’Enquête sur les dépenses des ménages de 1997 et 1998, les deux seules années où Statistique Canada identifie le sexe des enfants de 0-17 ans. Les résultats empiriques suggèrent que les effets sont peu marqués et systémiques.
EN:
Recent research suggests that the sex of a child has a large and varied impact on parental behaviours and family outcomes. A general finding emerges from this literature: in terms of family choices (marriage, divorce, fertility) and individual behaviours (work, consumption, and non-market activities), there are noteworthy differences between men and women. The empirical findings are consistent with economic models that explain intra-family behaviours as the result of a process of complex negotiations over time allocation and family resources and the sharing of family “surplus” (gains from living with spouse compared to being single). This research approaches this question by analysing family expenditures for consumer goods and services for families that have one or two same-sex children. The empirical analysis tries to uncover gender effect for family expenditures by estimating the impact of children’s sex on a diversity of categorical expenses qualified as family products, such as housing and durable goods. Other types of products are also analyzed (food, medical services, recreation, food purchased from restaurant, personal services, health care services and products, gifts of money and contributions). The analysis uses the public micro-data of Statistics Canada’s Survey of Household Spending for years 1997 and 1998; the only two years where the sex of children aged 0 to 17 years are identified. The results suggest that gender effects are non-systemic and do not stand out.
-
Quand un et un ne font plus deux : calcul d’échelles d’équivalence intrafamiliales au moyen d’un modèle collectif
Frederic Vermeulen and André Watteyne
pp. 155–180
AbstractFR:
Dans cet article, nous présentons un modèle collectif avec consommation publique. Ce modèle est basé sur celui, plus général, de Browning, Chiappori et Lewbel (2004). Au lieu d’estimer une technologie de consommation, qui capte toutes les économies d’échelle liées à la vie en couple, nous déterminons a priori les biens qui sont consommés de façon privée et ceux qui le sont de façon publique. Le modèle collectif en question est complètement identifié si l’on suppose que les préférences relatives aux biens privés et publics sont les mêmes pour qui vit en couple que pour qui vit seul. Le modèle nous permet de calculer des échelles d’équivalence applicables au sein du ménage. Ainsi, on échappe aux critiques formulées à l’encontre des échelles d’équivalence traditionnelles. Le modèle est appliqué aux données sur la consommation tirées de trois enquêtes de budget belges récentes.
EN:
In this paper, we present a collective model with public consumption. It is based on the more general model of Browning, Chiappori and Lewbel (2004). Rather than estimating a consumption technology, which captures all economies of scale of living in a couple, we determine a priori which goods are privately and which goods are publicly consumed. The collective model is completely identified by assuming that preferences over private and public goods are the same for singles and individuals in couples. The model allows calculating intra-household based equivalence scales, which meet the objections against traditional equivalence scales. It is applied to consumption data from three recent Belgian budget surveys.
-
Les modèles non coopératifs d’offre de travail : théorie et évidence
Olivier Donni
pp. 181–206
AbstractFR:
Cet article s’intéresse aux modèles non coopératifs d’offre de travail. D’abord, nous développons un modèle d’offre de travail qui généralise la plupart des spécifications rencontrées dans la littérature. Ensuite, nous étudions les propriétés en termes de testabilité et d’identifiabilité de ce modèle et de ses variantes. Enfin, nous présentons des tests empiriques de ces modèles en utilisant les données du PSID.
EN:
The present paper examines the theory of non-cooperative models of labor supply. Firstly, we develop a general framework that contains the various labor supply models found in the literature as particular cases. Secondly, we derive the properties of testability and identifiability of these models. Thirdly, we present empirical tests and compare these models using a sample extracted from the PSID.
-
Effets d’une réforme fiscale sur l’offre de travail des ménages dans un cadre collectif simulé
Olivier Bargain and Nicolas Moreau
pp. 207–246
AbstractFR:
La littérature contient très peu de recherches empiriques concernant les effets distributifs du système sociofiscal à l’intérieur du ménage. Nous simulons cet effet dans le cadre du modèle collectif d’offre de travail lorsque l’on passe d’une taxation jointe à une taxation individuelle en France. Nous montrons que la contribution relative de l’épouse aux revenus familiaux après impôts est un déterminant significatif de la négociation au sein du couple, avec une très faible élasticité cependant. En conséquence, les réactions d’offre de travail dues à la réforme sont essentiellement induites par les effets traditionnels (substitution et revenu), tout comme dans un modèle unitaire. Une analyse de sensibilité montre que l’effet distributif capturé par le cadre collectif est significatif seulement dans le cas de réformes fiscales de grande ampleur et peu réalistes. Ce résultat suggère cependant d’amplifier les recherches sur le lien entre fiscalité, transferts et décision intrafamiliale. En particulier, il convient d’ajouter plus de structure que n’en permet le modèle collectif afin de caractériser plus précisément la façon dont la fiscalité pourrait jouer sur la négociation au sein du ménage.
EN:
The literature on household behavior contains hardly any empirical research on the within-household distributional effect of tax-benefit policies. We simulate this effect in the framework of a collective model of labor supply when shifting from a joint to an individual taxation system in France. We show that the net financial contribution of the wife is a significant determinant of intrahousehold negotiation but with very low elasticity. Consequently, the labor supply responses to the reform are entirely driven by the traditional substitution and income effects as in a unitary model. A sensitivity analysis shows that the distribution effect captured by the collective model is significant only when tax reforms are unrealistically radical and of extended scope. This result suggests to investigate further the intricate link between taxation, redistribution and intrahousehold decisions. In particular, more structure should be added than is contained in the collective setting in order to characterize more precisely the way taxation could influence the intrahousehold negociation.
-
La production domestique dans les modèles collectifs
Benoît Rapoport, Catherine Sofer and Anne Solaz
pp. 247–269
AbstractFR:
Nous présentons ici des résultats nouveaux dans le cadre des modèles collectifs avec production domestique. Nous montrons que les résultats d’identification de la règle de partage obtenus dans Chiappori, Fortin et Lacroix (2002), à partir d’un modèle standard d’offre de travail, peuvent être étendus à un modèle avec production domestique, ce qui permet une définition plus satisfaisante du loisir. La méthode issue du résultat théorique de l’article nécessite uniquement l’observation des temps de travail domestique et marchand des deux membres adultes du ménage. Les estimations comparatives des modèles avec et sans production domestique, réalisées à partir de données françaises (enquête INSEE « Emplois du temps »), montrent que l’on obtient des résultats un peu différents, et surtout, plus robustes, pour le modèle dans lequel le temps de travail domestique est pris en compte.
EN:
This paper presents new general results in collective models with household production. We show that the identification of the sharing rule, obtained in Chiappori, Fortin and Lacroix (2002) using a standard labor supply model, can be extended to a model including household production, thus based upon a more satisfactory definition of leisure. The method derived from our theoretical results only implies that both market time and time devoted to household production by both members of the household are observed in the data. Comparing the results obtained with and without domestic time, using French data of the INSEE survey “Emplois du temps”, show that slightly different, and more robust results are obtained when including household production.
-
Les transferts ascendants au Bangladesh, une décision familiale?
François-Charles Wolff
pp. 271–316
AbstractFR:
Cet article apporte un éclairage sur la prise de décision dans la famille, dans le domaine des transferts versés par les enfants adultes à leurs parents âgés. D’un côté, un enfant doit composer avec son éventuel conjoint pour s’occuper de ses parents et beaux-parents. De l’autre, chaque enfant peut compter sur un éventuel soutien de ses frères et soeurs pour la prise en charge des ascendants. Nous cherchons ici à savoir dans quelle mesure il importe de prendre en compte ces effets de fratrie pour comprendre les solidarités ascendantes. Nous examinons l’existence d’éventuels arrangements intrafamiliaux à partir de l’enquête MHSS réalisée en 1996 au Bangladesh. Nos résultats économétriques pour les transferts ascendants indiquent que les comportements des frères et soeurs ne sont pas indépendants les uns des autres.
EN:
This paper sheds light on the decision-making process within the family and deals with private transfers given by adult children to their elderly parents. On the one hand, each child has to bargain with his/her spouse to care for parents and parents-in-law. On the other hand, each child may rely on a potential support from other siblings when helping the parents. We wonder here whether it matters to account for arrangements between siblings to explain the pattern of upstream transfers. We examine the possibility of intra-family arrangements using the MHSS survey conducted in 1996 in Bangladesh. Our econometric results show that the transfer decisions of the various siblings are not independent from each other.