Relations industrielles
Industrial Relations
Volume 46, numéro 4, 1991
Sommaire (26 articles)
Articles
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Contrôle du travail et absences de courte durée: une étude empirique
Jacques Bélanger, Michèle Bilodeau et Alain Vinet
p. 703–721
RésuméFR :
Au-delà du comportement individuel, l'absence s'inscrit dans une dynamique sociale. À partir d'une étude de terrain dans une grande entreprise québécoise, cet article associe le phénomène des absences brèves et autorisées à un modèle de contrôle du travail caractérisé par l'autonomie ouvrière et une relation de coopération sur le plancher de production. La gestion des absences était l'une des composantes de la relation d'échange entre le superviseur et les subordonnés, ce qui permettait d'atténuer les effets de l'absence et d'évacuer toute dimension conflictuelle. De façon générale, l'absence de courte durée représentait toujours une source d'incertitude, mais son effet sur la productivité était très faible.
EN :
There is a small body of sociological literature which suggests that absenteeism is a form of individual behaviour which can only be properly understood as part of the social dynamics evolving at the workplace. This article presents some fieldwork material from a large Quebec engineering factory. Its objective is to enquire into the expected association between control over labour and short-term absenteeism by analysing a rich series of data covering a period of 14 months, from May 1986 to the end of June 1987. The analysis only concerns the spells of absence of three consecutive days or less, because such events of short duration are obviously more likely to be influenced by social control and choices. It is worth stressing first that these periods of absence lasting three days or less, and thus considered as short-term, make up more than two-thirds of al spells of absence in this plant. And these events, which exclude those registered under the category «lateness», are almost entirely made up of absences of a day or less. Table 1 shows that of the 3509 periods of absence in the factory, no less than 58,8% were authorized by the supervisor. In the large department of equipment installation where we conducted observation, two-third of all episodes of absence were authorized and only 15,5% were registered as unauthorized absence. In the same department, no less than 78,1% of employees were absent at least once during the 14 month period (Table 2), and 42,5% of these took four periods of absence or more (Table 3).
Field research helps us to understand the high proportion of authorized
absences, especially in the equipment department. It would seem that behaviour was influenced by the specifie form of labour control observed in the factory. This pattern of control was characterized by autonomy and much cooperation on the part of workers in their production activity. This, of course, depended on an exchange relationship between workers and supervisors, each party finding a strategic advantage. The management of short-duration absences was very decentralized and relied greatly on the informal relationship between workers and their supervisors. The latter had great discretion over the authorization of each spell of absence and the overall assessment of each case in the eventual application of disciplinary measures. The fieldwork also allowed us to observe a set of particular arrangements made on the shop-floor, as and when the need arose, concerning the authorization of absence by the supervisor and the means to alleviate its effects on production. Given the method of fabrication, it was absolutely necessary that the work was completed at each station before the end of the shift. In such a context, absences represented an important source of uncertainty for the supervisors, and organizational means were anticipated to alleviate this uncertainty. These social arrangements shaped individual behaviour in a way which resulted in the alleviation of the effects of absence and in a dissipation of any conflictual dimension.
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Collective Bargaining and the Charter: Assessing the Impact of American Judicial Doctrines
Donald D. Carter et Thomas McIntosh
p. 722–750
RésuméEN :
This study analyses the impact of American judicial doctrines upon recent Charter decisions relating to Canada's collective bargaining laws. The first section of the paper explores the constitutional foundations of the Canadian and American labour regimes in terms of the fundamental values entrenched in their respective constitutional arrangements. The second section of the paper is an overview of the Charter era labour regime as it has been articulated by the Canadian judiciary and, in particular, by the Supreme Court of Canada. It is the mixed results of this part of the investigation that led us to some tentative conclusions about the impact upon Canadian courts of American judicial influences.
FR :
Cet article cherche à évaluer l'effet de la jurisprudence américaine sur les décisions récentes rendues en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés eu égard aux lois canadiennes sur la négociation collective. À ce sujet, nous nous demandons si la Cour suprême du Canada s'efforce d'établir une jurisprudence «faite au Canada» ou si elle s'inspire profondément de la jurisprudence américaine. La réponse à cette interrogation a des impacts sérieux sur l'avenir du droit du travail au Canada.
Nos conclusions sont nécessairement sujettes à révision vu le nombre limité d'arrêts de la Cour suprême en ce domaine. Même si l'influence américaine semble avoir été présente, il faut noter que la Cour suprême n'a pas entièrement adopté le raisonnement de la jurisprudence américaine. Cette approche s'explique par l'effet combiné des différences institutionnelles et socio-politiques entre les deux pays, différences que la Cour suprême n'a pas manqué de souligner. Nous soutenons cependant que la décision à venir dans l'affaire Lavigne c. O.P.S.E. U. (N.D.L.R. au moment de mettre sous presse, cette décision a été rendue) est très importante à cet égard. En effet, l'approche adoptée par la Cour suprême dans cette affaire montrera jusqu'à quel point la jurisprudence américaine influencera le statut constitutionnel des lois actuelles visant la négociation collective au Canada.
Dans la première partie de cet article, nous examinons les fondements constitutionnels des deux régimes de droit du travail à la lumière des valeurs fondamentales qui leur sont sous-jacentes. Pour ce faire, nous analysons et critiquons les travaux de S.M. Lipset sur les différences entre la culture politique du Canada et des États-Unis. Même si nous questionnons la signification des différences identifiées par Lipset, notre propos est plutôt d'explorer comment la Charte canadienne des droits et libertés va influencer ces différences à court et à long terme.
Dans la seconde partie de cet article, nous faisons une revue du régime du droit du travail sous la Charte tel qu'articulé par le régime judiciaire canadien et en particulier par la Cour suprême. Notons qu'en y recherchant les influences américaines, nous avons pris soin d'examiner de très près la manière dont les cours canadiennes ont traité les précédents importants dans la jurisprudence américaine. Les résultats mitigés de cette analyse nous amènent à conclure, sous toute réserve, que l'affaire Lavigne va probablement indiquer l'étendue de l'influence américaine sur les lois canadiennes visant la négociation collective par l'interprétation et l'application de la Charte.
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Training Factors within the Ontario Manufacturing Sector
Rolland LeBrasseur et Marie-Josée Lambert
p. 751–765
RésuméEN :
This article presents the results of a survey of the Ontario manufacturing sector, and identifies intra- and extra- organizational factors influencing the training activities of firms. On average, employees received 2,6 days of directly provided training, and some supported training. It was concluded that improvement in training participation rates has taken place throughout the 1980s, and that leading companies are reaching new levels in the duration of training offered. A variety of factors, such as Management Commitment, were found to be significant predictors of training activities.
FR :
L'objet de cette étude est de valider les facteurs organisationnels identifiés par Pettigrew et al. (1988) affectant les activités de formation d'une entreprise. L'étude repose sur trois hypothèses.
Hypothèse 1. La formation offerte par une entreprise (en nombre de jours) varie proportionnellement et positivement en fonction des quatre catégories de facteurs suivants: la stratégie de l'entreprise et l'importance attribuée à la compétence et à la formation des employés; le marché externe et interne de main-d’œuvre et l'importance accordée au marché interne; le support des personnes clés (ex.: la direction) et des systèmes de gestion à la formation; l'appui à la formation venant de l'extérieur de l'entreprise.
Hypothèse 2: L'influence des personnes clés et des systèmes de gestion est prépondérante.
Hypothèse 3: La formation varie de façon proportionnelle et négative en fonction des trois facteurs suivants: la simplicité du produit, la nouveauté des compétences requises et le petit nombre d'employés impliqués, et la préférence des gestionnaires pour le recrutement et l'embauche d'employés temporaires.
Deux-cent-trente-huit entreprises ont complété un questionnaire (taux de réponse de 25%). Afin de vérifier les hypothèses, deux variables dépendantes ont été créées: (1) ADPT ou la moyenne de jours de formation directe offerte par année à chaque employé, et (2) ATI ou la moyenne de temps et d'effort consacrés à la formation de chaque employé selon une grille qualitative. Une analyse factorielle des composantes principales (avec rotation varimax) a fait ressortir 15 facteurs (les variables dépendantes mises à part) similaires à ceux identifiés par Pettigrew et al. (1988).
Cependant, quelques précisions sont de mise pour le secteur manufacturier: les décisions d'allocation budgétaire semblent découler de l'engagement des gestionnaires envers la formation; les exigences des consommateurs quant à la qualité du produit créeraient une pression pour un produit plus complexe; et les opportunités de promotion découleraient des structures organisationnelles et de la prise de décision.
L'analyse de régression a permis d'identifier les sept facteurs ayant un pouvoir prédictif à l'égard de l'ATI (en ordre de puissance): FI - les systèmes formels et actifs de formation; F2 - l'engagement des gestionnaires et des ressources; F4 - l'infrastructure de formation extérieure à l'entreprise et les liens entre les deux; F3 - l'importance stratégique des compétences et de la formation; Fil - les chances de promotion et les décisions liées aux produits et marchés; F7 - les sources externes de financement; et finalement FIO - les contraintes à la formation. Une deuxième régression a retenu seulement deux prédicteurs de l'ADPT: F14 - l'utilisation des talents du personnel régulier pour les programmes de formation et F2 - l'engagement des gestionnaires et des ressources.
Les résultats démontrent une augmentation de la quantité de formation offerte dans le secteur manufacturier au cours des dix dernières années: présentement, la moyenne se chiffre à 2,6 jours par année par employé. Les analyses ont révélé que la formation ne découle pas seulement d'une gamme de facteurs situés à l'intérieur de l'entreprise mais également de facteurs extérieurs. De plus, contrairement au sens commun, il est surprenant de constater que les variables suivantes aient eu un impact négatif sur la formation: la présence d'un syndicat, la formation obligatoire en santé et sécurité, et la formation offerte par les fournisseurs; d'autres recherches sont nécessaires afin d'expliquer cette situation. Finalement, bien que ces résultats soient encourageants, il reste un travail important à faire pour rendre le questionnaire plus robuste et pour valider l'importance des facteurs de formation dans d'autres secteurs de l'économie.
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Historique des interventions du gouvernement du Québec dans le domaine de la main-d'oeuvre: une politique en panne
Lise Poulin Simon et Judith Carroll
p. 766–802
RésuméFR :
L'objet de cette étude est de mettre en lumière l'évolution historique des interventions du gouvernement du Québec dans le domaine de la main-d'oeuvre à partir du début du XXe siècle. La démarche historique permet d'une part de dégager la rationalité économique de ces interventions et d'autre part d'offrir des explications à l'avortement des multiples tentatives du gouvernement du Québec de se doter d'une politique active du marché du travail.
EN :
Since the beginning of the twentieth century, and under the pressure of the fluctuating economic situation, the Quebec Government has gradually adopted a series of measures and created several institutions which are directly associated to the labour market or manpower policy. Furthermore, since the beginning of the 1960s, different Quebec governments have manifested their intent to implement a comprehensive labour market policy, specifically aimed towards Quebec's needs.
However, all attempts made at achieving such a policy have falled. Belanger mentions that the Manpower and Income Security Department acknowledged, before the Beaudry Commission in 1985, having renounced all hopes of publishing a manpower policy, and would restrict its program of action to a small number of specific objectives. Sexton has reached the same conclusion. This paper traces the evolution of these labour market measures since the beginning of the century. It also looks at the economic rationality of the Quebec government's interventions and at the crucial disparities between government discourse and action in the labour market. This paper also tries to explain the repeated fallure of projects aimed at implementing a comprehensive labour market policy for Quebec.
The historical aspect shows that the Quebec government's action was motivated by three main objectives: to protect manpower from exploitation; to protect labour ethics; and to protect Quebec's jurisdiction within its competence, and not trying to improve labour market activities. This is more like a defensive rather than pro-active approach. On the other hand, from 1960 onwards, the several policy documents issued from either public administration or commissions of inquiry suggest that the Quebec legislator adopts an active labour market policy. These recommendations have always remained unheard. The governments which succeeded Lesage's Government in the 1960's have not been able to propose their orientations on the subject neither to the population nor to their economic partners, as was the case in some other Canadian provinces.
Various economic and political causes can explain this chronic fallure, among which two appear particularly important:
- Firstly, all orientation documents issued from the Quebec public administration maintain, that an active labour market policy must be aimed at a maximal exploitation of human resources. However, neither Quebec nor the other Canadian governments have committed themselves to the development of an economic strategy aimed at the pursuit of full employment. Besides, beginning in the 1940s Quebec, together with the other provincial governments and municipalities, has agreed to let the federal government be responsible for employment policies. As a result, Quebec's labour market has experienced a lack of common policy orientations as well as a competition between federal and provincial governments. The financial capacity and the exclusive responsibility of the federal government toward employment and unemployment insurance have proved the predominance of the federal
strategies, at the expense of constant political conflicts. Quebec Government gradually confined itself to defensive actions in order to protect its constitutional authority. The lack of priority towards full employment and the competition between federal and provincial governments appear to be the main causes for the government's inability to implement a comprehensive labour market policy. The same applies to the federal government.
- Secondly, following the Second World War, the choice made by the Canadian government to focus on income security programs rather than on employment stabilization as part of a strategy to stabilize the economy and the division of responsibilities between the federal and provincial governments, as far as unemployment insurance and welfare are concerned, contributed to the division of labour oriented interventions according to these two clienteles. From 1970 onwards, chronic unemployment affects the financing of income security programs and forces the Quebec Government to develop a labour policy centered mainly on welfare. This resulted in the recent reform of welfare. It thus appears that the disparity between government discourse and action on labour market policy will not disappear without a reappraisal of both the economic and political aspects of governement action.
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The Impact of Canadian Training Programs on Long Term Unemployed
Randall Geehan et Gene Swimmer
p. 803–818
RésuméEN :
The purpose of this paper is to develop an econometric model capable of correcting the selection bias resulting from any simple comparison between participants and non-participants to training programs. It also aims at estimating the incremental impact of three Canadian training programs aimed at the long term unemployed.
FR :
Durant la dernière décennie, le Canada a connu une croissance inquiétante de son chômage de longue durée. Croyant qu'un tel phénomène résulte d'une combinaison de formation inadéquate, d'un bas niveau de qualification et d'une faible motivation, plusieurs gouvernements, y compris celui du Canada, ont établi des programmes de formation pour ces individus. Les participants à ces programmes ne sont pas choisis au hasard. Le processus de sélection implique des décisions prises tant par les administrateurs de programmes que par les candidats potentiels. Ainsi, de simples comparaisons entre participants et non participants quant à leur employabilité et leurs revenus seraient biaisées.
L'objet de cet article est de présenter un modèle économétrique (fondé sur celui de Heckman 1979) capable de corriger ce biais résultant de la sélection et de mesurer empiriquement l'effet cumulatif de trois programmes de formation pour les chômeurs de longue durée. Le modèle consiste en une équation de probabilité de type 'probit' eu égard à la possibilité de participation à la formation et d'une paire d'équations pour mesurer la performance (gains et employabilité) sur le marché du travail des participants et des non-participants. Plusieurs caractéristiques non observables (e.g. les habiletés et la motivation) influent à la fois sur la décision de participer à ces programmes et sur la performance sur le marché du travail. Comme résultat, la covariance des termes d'erreurs entre la participation et l'employabilité est différente de zéro. La procédure statistique utilisée permet cette possibilité et génère des estimations consistantes pour les équations de gains et d'employabilité tant pour les participants que pour les non participants. Les valeurs ainsi calculées des gains et de l'employabilité sont alors utilisées pour évaluer l'équation structurelle de probabilité concernant la participation à un programme de formation professionnelle.
Les estimations portent sur un échantillon d'approximativement 1 500 participants et non participants ayant travaillé moins de dix pour cent du temps en 1985. Des équations de régressions distinctes ont été estimées pour les hommes et pour les femmes de l'échantillon.
Les résultats indiquent que les femmes bénéficient clairement des programmes de formation en termes d'employabilité et de revenu. Pour les hommes, les résultats sont négatifs, comme aux États-Unis. Selon les hypothèses avancées, la participante moyenne travaillerait de 9 à 17 semaines de plus par année et gagnerait entre 41$ et 54$ de plus par semaine que la non participante moyenne. En contraste, le participant moyen travaillerait de 4 à 11 semaines de moins par année et gagnerait entre 96$ et 121$ de moins par semaine que le non participant moyen. Ces résultats ont été obtenus après une courte période post-formation durant laquelle toutes les personnes participant aux programmes pouvaient recevoir des prestations d'assurance-chômage alors que les non participants n'y étaient pas éligibles.
Il faut donc interpréter ces résultats avec prudence. De plus, les participants retirent sans aucun doute des avantages substantiels en termes d'estime de soi et de rémunération pour accomplir quelque chose de constructif, au lieu de ne rien faire. Les résultats obtenus suggèrent aussi des avenues pour l'administration de tels programmes de formation professionnelle. Ils devraient s'adresser de plus en plus aux femmes vu le succès de leur expérience de marché du travail post-formation. Ensuite, il faudrait accroître les efforts de placement des stagiaires auprès d'employeurs privés. Il appert que ce moyen augmente l'efficacité de la formation, sans doute parce que plusieurs personnes en formation chez des employeurs font une assez bonne impression pour ensuite être embauchées de façon permanente.
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Longitudinal Estimates of the Union Effects on Wages, Wage Dispersion and Pension Fringe Benefits
R. Swidinsky et M. Kupferschmidt
p. 819–838
RésuméEN :
This study provides evidence of the union effect on wages, wage dispersion and pension fringe benefits derived entirely from the new Canadian longitudinal micro data base.
FR :
La recherche empirique canadienne sur les effets économiques des syndicats a beaucoup plus porté sur les taux de salaires que sur les avantages sociaux. Cependant, des études américaines récentes ont montré que les effets du syndicalisme sur les avantages sociaux, la dispersion des taux de salaires, la permanence, la productivité et les profits sont importants. L'objet du présent article vise à donner une image plus complète des effets des syndicats canadiens en évaluant les différences qui existent entre syndiqués et non-syndiqués dans les traitements, la dispersion de salaires et les régimes de pension. En théorie, on devrait s'attendre à ce que les syndicats exercent un effet à la hausse sur les salaires relatifs des travailleurs syndiqués et un effet à la baisse sur les écarts de salaires entre ces derniers. D'autres études soutiennent également que les syndicats augmentent la part de la rémunération globale qui est versée sous forme d'avantages sociaux, principalement les prestations de retraite. Alors que l'influence des syndicats sur le niveau des salaires résulte de leur pouvoir monopolistique, la dispersion des salaires et le niveau des prestations de retraite découlent davantage des préférences du syndiqué médian dont l'influence s'exerce selon le modèle de l'électeur médian.
D'une façon générale, l'appréciation des effets d'ordre économique des syndicats, lorsqu'on traite des données individuelles à l'aide de techniques statistiques du type des moindres carrés ordinaires, a tendance à se compliquer à cause d'erreurs de sélection. En effet, les différences entre syndiqués et non-syndiqués sont estimées à partir de sous-populations différentes malgré les contrôles qu'on peut insérer dans les équations de régressions. Pour contourner ce problème, les présentes estimations portent sur des données longitudinales et font appel à une méthode dite «fonction à effet constant» qui consiste à examiner les salaires touchés par le même travailleur dans un emploi syndiqué et dans un autre qui ne l'est pas pour savoir s'il reçoit un salaire plus élevé dans le premier cas. Les données sont tirées d'une enquête sur l'activité du marché du travail effectuée par Statistique Canada en 1986 afin d'établir un portrait du comportement des Canadiens sur le marché du travail. Les principales estimations proviennent d'un échantillon de 2 438 individus qui ont occupé au moins deux emplois différents en 1986. Pour la majorité des salariés compris dans l'échantillon, il n'y a eu aucune modification à leur statut syndical durant cette période lorsqu'ils sont entrés au service de nouveaux employeurs, mais pour 18,8% d'entre eux, ce changement d'emploi a entraîné un changement de statut syndical.
Dans le cas des niveaux de salaires, les résultats indiquent que les salaires de ceux qui étaient non syndiqués et qui le sont devenus à la suite d'un changement d'emploi, ont augmenté de 17,6% tandis que les salaires de ceux qui ont perdu le statut de syndiqué ont baissé de 13,4%, ce qui laisse un écart net de 15,5% entre les deux catégories.
L'influence des syndicats sur la dispersion des salaires, telle que mesurée par l'écart-type de l'équation des salaires sous forme logarithmique, présente moins d'uniformité. L'écart-type baisse légèrement pour les travailleurs dont le statut de non-syndiqué change pour celui de syndiqué mais il augmente subitement pour ceux dont le statut passe de syndiqué à non-syndiqué. En moyenne, il semble que les syndicats réduisent l'écart-type d'environ 5%. En contrôlant l'effet sur le niveau des salaires, l'impact du syndicalisme sur la probabilité de dispositions relatives aux fonds de pension s'établit à 19% une fois corrigé le biais de sélectivité. Toutefois, lorsqu'on y ajoute l'effet indirect des hausses de salaires attribuables au syndicalisme, l'effet global des syndicats sur les dispositions relatives aux fonds de pension s'élève à 22%.
Même si ces mesures longitudinales montrent que les syndicats ont un effet marqué et prévisible sur les niveaux et la dispersion des salaires ainsi que sur les dispositions conventionnelles relatives aux caisses de retraite, celles-ci peuvent être sous-estimées si les données longitudinales contiennent des erreurs de mesure. Pour contrer de tels biais, les effets des syndicats ont été estimés en se basant cette fois sur des données comparables en coupes instantanées. L'influence des syndicats, tirée tant de l'analyse des données longitudinales que de celle des données en coupes instantannées, s'avère presque identique en ce qui se rapporte aux fonds de pension, n'étant que marginalement plus élevée dans le cas des données des coupes instantannées. Par contre, les effets des syndicats sur la dispersion des taux de salaires sont beaucoup plus grands dans l'analyse en coupes que dans l'analyse longitudinale. Toutefois, les erreurs de mesure ne sont pas le seul facteur qui puisse expliquer cet écart dans l'estimation des effets sur la dispersion des salaires. Ces résultats incitent les auteurs à penser que leurs mesures longitudinales sont vraisemblablement correctes en ce qui a trait aux effets réels des syndicats sur les niveaux et la dispersion des salaires ainsi que sur les dispositions conventionnelles relatives aux caisses de retraite.
Note
Information
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Décisions rendues par le Conseil canadien des relations du travail
Pascale Racicot
p. 850–858
RésuméFR :
Dans cette affaire, le Conseil canadien des relations du travail (le Conseil), traite d'une plainte déposée par une employée qui prétend que son syndicat a manqué à son devoir de représentation juste en omettant de se conformer à une simple procédure administrative, cette dernière omission ayant pour effet de priver la plaignante de l'audition de son grief.
Le contexte dans lequel cette décision a été rendue a ceci de particulier que le syndicat plaide coupable à l'accusation portée contre lui et qu'il offre de participer au redressement qui sera accordé par le Conseil.
Malgré tout, le Conseil applique les critères généralement reconnus par la jurisprudence qui établissent une nette distinction entre une négligence «grave» et une négligence «simple», cette dernière étant insuffisante pour emporter l'application de l'article 37 du Code canadien du travail (le Code).
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Changements dans les législations du travail au Canada
Recensions / Book Reviews
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R. Blanpain (dir.), Comparative Labour Law and Industrial Relations in Industrialised Market Economies
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Hans Slomp, Labor Relations in Europe: A History of Issues and Developments
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Theresa S. Malkiel, The Diary of a Shirtwaist Striker
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Bill Ford and David Plowman (Eds), Australian Unions: An Industrial Relations Perspective
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André Beaucage, Syndicats, salaires et conjoncture économique
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Leo McGrady, A Guide to Organizing Unions
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Michael Poole, The Origins of Economic Democracy: Profit Sharing and Employee-Shareholding Schemes and Michael Poole and Glenville Jenkins, The Impact of Economic Democracy: Profit Sharing and Employee Shareholding Schemes
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Jairus Banaji and Rahini Hensman, Beyond Multinationalism: Management Policy and Bargaining Relationship in International Companies
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Yves Bertrand et Patrick Guillemet, Les organisations: une approche systémique
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David Marsden, Marchés du travail: limites sociales des nouvelles théories
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D. Ashton and G. Lowe, Making thier Way: Education, Training and the Labour Market in Canada and Britain
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National Commitee on Pay Equity, Legislating Pay Equity to Raise Women's Wages. A Progress Report on the Implementation of the Ontario, Canada Pay Equity Act
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Stephen Brooks and Andrew Stritch, Business and Government in Canada